Soudain le silence s’est fait
Quelques simples mots après le décès hier du lieutenant-colonel de Gendarmerie Arnaud BELTRAME. Pas sur l’environnement de cet acte, où là les polémiques agitent les récupérateurs de tous bords, mais sur quelques fondamentaux où le geste héroïque du lieutenant-colonel BELTRAME bloque – un temps – les commentaires stériles. Pour une fois.
Pour une fois, pas de polémique sur son début de parcours.
Cet homme était un appelé du Service National, un appelé du contingent, élève officier de réserve (EOR) à Draguignan (pas à Saint Cyr l’Ecole) assez brillant pour décrocher une place dans l’unique régiment parachutiste de son arme d’origine, l’Artillerie (comme Napoléon, qui lui n’a pas réussi à devenir parachutiste) où il servira au 35e Régiment d’Artillerie Parachutiste à Tarbes comme aspirant du contingent, puis comme sous-lieutenant ORSA (Officier de Réserve en Situation d’Activité) ce qui conduit aujourd’hui aux OSC (Officiers Sous Contrat). Ce réserviste à qui ses chefs faisaient confiance n’est pas entré par la plus grande porte dans l’institution militaire, mais par une des plus modestes – mais réelle – voies d’accès, celle des officiers de réserve.
Pour une fois pas de polémique sur les premiers de la classe.
Les places en régiment parachutiste étaient réservées « de fait » au sommet du classement (quant il y en avait) parce que les plus cotées et les mieux payées; et pour l’Artillerie il y avait un seul régiment qui pouvait en offrir une. Cette première compétition, il la gagnera. Ensuite il a choisi la voie du concours d’accès à l’École Militaire Interarmes (EMIA), et non de Saint Cyr, à Coëtquidan où il finira… premier. Major de sa promotion, il entre à L’École des Officiers de la Gendarmerie et en sortira toujours en tête ce qui lui permettra, toujours dans le peloton de tête d’aller à l’EPIGN. D’affectation en affectation il travaille dur pour avoir toujours une place en tête. On ne va pas le commenter, ce n’est guère à la mode, mais c’est ainsi que s’est forgé cet officier, qui gagnera ensuite une croix de la Valeur Militaire en opération extérieure.
Le lieutenant colonel Arnaud BELTRAME, salut à l’étendard; in memoriam… © Gendarmerie Nationale
Pour une fois pas de polémique sur la Franc-Maçonnerie et l’humanisme.
Son décès tragique révèle un pan de sa vie privée, et quelque part le choix de se perfectionner lui-même, alors que ses pairs le regardaient déjà comme l’un des plus brillants. Il a choisi une initiation pour revenir sur lui, pour s’améliorer afin de contribuer à améliorer la société qui l’entourait. Il est rare que l’on l’apprenne, et souvent on ne l’apprend qu’avec des commentaires déplacés sur carriérisme ou affairisme. Là on se doute que ce n’est ni l’un ni l’autre. Connu et reconnu dans sa hiérarchie il a décidé de revenir sur lui-même; pierre brute retaillée de l’intérieur, pour mieux se comprendre et comprendre les autres. Dimension humaniste qui éclaire son parcours d’une autre lumière.
Pour une fois pas de polémique… sur la Foi.
A l’heure où l’on profane jusqu’à la basilique où se trouvent les restes des Rois de France, non sans quelque indifférence publique; à l’heure ou quelques arriérés viennent s’en prendre aux Gendarmes qui célèbrent simplement Sainte Geneviève, au nom d’une conception étriquée de la laïcité; c’est dans sa vie privée qu’il décide de marquer sa Foi par un mariage religieux.
Reste de tout ceci un officier exemplaire, ce qui est un pléonasme car tout officier doit être exemplaire.
Reste l’exemple de ce parcours, modeste, travailleur, brillant, volontaire, humaniste, jusqu’au sacrifice si nécessaire. Ce sacrifice que l’on ne souhaite pas comme un suicide mais que l’on est prêt à assumer en conscience comme une part du noble métier des armes.
« Pour la Patrie, l’honneur et le droit ».
Encore une fois, la devise de la Gendarmerie Nationale s’applique à l’un des siens qui disparait.
Ceux qui ont compris ce commentaire respectent ce parcours. Les autres ricanent, ou déversent leur haine comme ils l’ont déjà fait en se réjouissant de façon obscène de la mort d’un Gendarme.
Les mêmes, n’en doutons pas, qui seraient tombés à genoux si c’était leur femme, leur mère, ou leur fille, que le lieutenant-colonel BELTRAME avait sauvé, au prix de sa vie, en la remplaçant.
Rien de plus à dire…
Didier CODANI
Dimanche 25 mars 2018
Source : Médiapart
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