Permis de conduire : cette arnaque qui vous fait payer la contravention d’un autre
Des malfaiteurs vendent des numéros de permis de conduire perdus ou volés, pour faire payer ses PV par un autre. Un phénomène émergent et un cauchemar assuré pour les victimes.
La traque des cerveaux de l’arnaque, souvent protégés par l’anonymat d’une messagerie cryptée ou d’annonces éphémères sur les réseaux sociaux, est difficile. LP/Philippe Lavieille
En apparence, la machine est bien huilée. Neuf millions de procès-verbaux (PV) sont dressés chaque année en France par le système automatisé des amendes. Mais des délinquants ont repéré le grain de sable. Et de manière finalement assez simple. Leur méthode consiste à voler les données de permis de conduire perdus ou piratés et à les diffuser sur Internet avant de faire endosser toutes sortes d’amendes aux malheureux détenteurs des cartons roses. Moyennant, bien sûr, une rétribution, environ la moitié du prix original de l’amende.
Si la police parvient à identifier et confondre certains des contrevenants qui font payer leurs amendes pour des infractions routières à d’innocents automobilistes, la traque des cerveaux de l’arnaque reste complexe. Ils sont souvent cachés derrière l’anonymat d’une messagerie cryptée ou d’annonces éphémères sur les réseaux sociaux ou les sites d’annonces en ligne. Il existerait même de faux cabinets d’avocat sur Facebook, qui, sous couvert d’astuces juridiques, exploitent en réalité le filon.
A Lille (Nord), en avril, treize automobilistes ont été condamnés par le tribunal de police après avoir utilisé ce moyen pour échapper à la sanction. Ils avaient répondu à une annonce sur Snapchat avant de se rendre dans deux bars de Lille et de Loos, où les malfaiteurs récupéraient leur PV en leur promettant l’immunité. Ils ont usurpé l’identité de deux personnes, à qui ils ont attribué un millier de contraventions.
Au tribunal de police de Versailles (Yvelines), le commissaire Olivier Bonnefond affirme avoir traité « 40 dossiers en deux ans ». « C’est parfois une copie de permis de conduire qui circule dans un quartier, ajoute-t-il. Un gérant d’entreprise de VTC, qui a gardé la copie du permis d’un employé resté quinze jours et qui en profite pour lui attribuer toutes les amendes de ses voitures. Le centre de traitements des amendes de Rennes (Ille-et-Vilaine) nous envoie des synthèses quand un permis est utilisé de cette façon », explique-t-il.
Des malfaiteurs difficiles à identifier
Le phénomène ne s’est toutefois pas encore diffusé massivement. La plate-forme PHAROS (plate-forme d’harmonisation, d’analyse, de recoupement et d’orientation des signalements), qui recueille des signalements sur le cybercrime, n’a enregistré que 184 messages concernant des usurpations d’identité sur les 163 000 recueillis en 2018. Cependant les enquêtes sont difficiles. On peut faire bloquer un site, mais la pièce d’identité ou le permis de conduire continueront à circuler sur les réseaux. La seule solution pour identifier les malfaiteurs est donc de revenir aux méthodes ancestrales.
« Convoquer tous les utilisateurs du permis identifié grâce à leur plaque d’immatriculation, leur faire avouer comment ils ont fait pour récupérer l’identité d’un homme qu’ils ne connaissent pas », explique un enquêteur spécialisé dans la lutte contre les fraudes.
Les policiers n’excluent pas que derrière ce problème, qui reste pour l’instant traité comme un signal de faible intensité, on découvre de véritables officines. Surtout lorsque l’on sait que sur les 9 millions de procès-verbaux traités par an à Rennes deux millions d’automobilistes désignent un autre conducteur qu’eux.
Source : Le Parisien
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