Ne vous étonnez pas si un gendarme vous contrôle avec son smartphone !
Une gendarme effectue un contrôle routier, en décembre dernier à Martainville-Epreville (Normandie). (CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
La gendarmerie affiche sa volonté de passer à l’heure numérique, en particulier lors de ses contrôles routiers.
« 2017 sera l’année de la digitalisation de la gendarmerie », annonce fièrement d’entrée le colonel Yves Marzin. « En plus de lutter contre les cyber-menaces, nous allons déployer de nouveaux systèmes afin d’interagir avec les citoyens, et parfois les contraindre. »
Concrètement, après une première expérimentation dans le Nord en 2015, puis en Bourgogne l’an dernier, les gendarmes vont être dotés d’ici la fin 2017 de pas moins de 60.000 smartphones et tablettes, permettant de moderniser leurs process, en particulier lors de contrôles routiers.
« Diviser le temps par trois »
Lors d’une démonstration, le lieutenant-colonel Olivier Langou présente un contrôle de papiers classique auprès d’un citoyen-test :
« – Bonjour, vos papiers s’il vous plaît.
– J’ai la carte grise, mais pas mon permis de conduire. En revanche, j’ai mon passeport. »
Le lieutenant-colonel scanne d’abord la bande (dite « MRZ ») au bas de la carte grise avec l’appareil photo d’un smartphone Samsung modifié. En quelques secondes, s’affiche alors le véhicule sur le fichier des immatriculations, permettant au gendarme de contrôler les informations. S’affiche également la base des véhicules volés, pour que l’officier s’assure que la Renault Mégane du citoyen est en règle. A noter toutefois : l’appareil mobile du gendarme n’est pas connecté aux bases des assurances et ne peut donc pas vérifier la régularité à ce niveau-là.
Olivier Langou va alors reproduire la démarche de scan sur le passeport afin de s’assurer de l’identité du porteur, et interroger en quelques glissements de doigts la base des permis de conduire pour contrôler le nombre de points. Tout est en règle. Sauf qu’alors le lieutenant-colonel constate que la vitre arrière du véhicule est endommagée. Le contrôlé s’explique :
« Je l’ai trouvé comme ça ce matin. On m’a volé le blouson que j’avais laissé à l’arrière. Je l’emmène au garage ce soir, après le travail. »
Le gendarme peut alors, toujours depuis son smartphone, préparer un dépôt de plainte où s’intègre l’identité du citoyen, l’identité du véhicule, et des photos prises sur le vif du véhicule. L’ensemble est envoyé sur un cloud sécurisé, et Olivier Langou pourra le retrouver en un clic sur son ordinateur afin de l’imprimer et de le faire signer au citoyen lorsque celui-ci se présentera au poste.
Au total, le contrôle routier et la rédaction de la pré-plainte n’aura pas pris plus d’un quart d’heure. « C’est vraiment beaucoup plus rapide, on doit facilement diviser le temps par trois », estime le gendarme.
Plus de mobiles que d’ordinateurs fixes
Ce dispositif va se déployer massivement sur tout le territoire d’ici la fin de l’année 2017. « 100% des gendarmes des unités départementales seront équipés », souligne Yves Marzin. Quelques-uns recevront des tablettes, mais la grande majorité sera dotée de smartphones. Les 60.000 appareils sont loués, pour un coût total annuel de 20 millions d’euros.
Côté sécurité, il s’agit d’appareils Android grand public, entièrement modifiés par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) qui y intègre son propre système d’exploitation, baptisé « Secdroid ». L’environnement est alors totalement fermé : toutes les communications sont cryptées et le gendarme ne peut y installer que des applications développées spécifiquement.
« Pour des raisons de sécurité, il n’y a aucun lien avec des services privés, tels ceux de Google », souligne le colonel.
« En revanche, nous envisageons des liens avec des acteurs privés comme Waze afin de leur signaler des accidents avant même qu’on ait pu s’y rendre. »
Signe de changement d’époque : avec ses 60.000 smartphones et tablettes, la gendarmerie comptera bientôt plus d’équipements mobiles que d’ordinateurs fixes.
Boris Manenti
Source : L’ Obs
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