Les dossiers chauds qui attendent le successeur de Gérard Collomb au ministère de l’Intérieur
SECURITE Les syndicats de police et les organisations professionnels de la gendarmerie attendent du futur locataire de la place Beauvau qu’il poursuive les chantiers ouverts par Gérard Collomb…
Gérard Collomb a démissionné du gouvernement pour retrouver la mairie de Lyon — PDN/SIPA
- Emmanuel Macron a accepté la démission de son ministre de l’Intérieur dans la nuit de mardi à mercredi.
- Edouard Philippe va assurer l’intérim à l’Intérieur et a annulé son voyage officiel en Afrique du Sud prévu jeudi et vendredi.
- Le futur remplaçant de Gérard Collomb est attendu de pied ferme par les organisations syndicales de la police et les organisations représentatives de la gendarmerie.
Gérard Collomb est parti du ministère de l’Intérieur comme il y est arrivé. Sans que personne ne s’y attende vraiment. « Les conditions de son départ sont quand même ubuesques et hallucinantes, remarque Philippe Capon, secrétaire général du syndicat Unsa Police. C’est la première fois que je vois un ministre s’en aller sans avoir de successeur. Même Nicolas Hulot, qui est parti en colère, a attendu que son remplaçant arrive ». Le soudain départ à Lyon de ce proche du président de la République est d’autant plus étonnant qu’il avait lancé, lors de son passage place Beauvau, plusieurs chantiers restant inachevés.
Le plus gros est sans doute la mise en place de la PSQ (police de sécurité du quotidien), une promesse de campagne du candidat Emmanuel Macron. Censée rendre le travail des forces de l’ordre plus efficace et les rapprocher de la population, elle peine à convaincre les syndicats de police. Ils estiment que si l’idée n’est pas mauvaise, les moyens et les effectifs ne suivent pas. Derrière cet acronyme se cache un catalogue de mesures dont la plus importante consiste à renforcer la présence policière dans trente quartiers sensibles, notamment à Corbeil-Essonnes, Toulouse, Bordeaux ou Trappes.
Un nom leur a été donné : les quartiers de quartiers de reconquête républicaine. D’ici juin 2019, environ 600 fonctionnaires viendront renforcer les brigades spécialisées comme les brigades anticriminalité ou les brigades spécialisées de terrain. Mais le lancement, le 19 septembre dernier, du dispositif a été un peu éclipsé par l’annonce à L’Express de sa probable future démission du gouvernement. « C’est un sujet sur lequel nous sommes vigilants. Il faut attendre et faire un bilan et nous verrons alors les résultats de la PSQ », affirme Jean-Claude Delage, secrétaire général d’ Alliance police nationale.
« Ces dossiers, c’est un peu l’échec de Gérard Collomb »
Le successeur de Gérard Collomb est attendu de pied ferme par les organisations syndicales. Il devra notamment s’attaquer à quelques dossiers brûlants. « Conditions de travail et de vie au travail des policiers, cycles horaires, paiement des heures de nuit, allégement de la procédure pénale » ainsi que la « mise en œuvre totale » d’un protocole signé en avril 2016, liste Jean-Claude Delage. « Mais il y a encore d’autres choses à faire », poursuit le patron du syndicat majoritaire des gardiens de la paix. Il plaide notamment pour que le train soit gratuit pour les agents. Une façon, dit-il, de « mieux assurer la sécurité des Français ».
Philippe Capon complète cette liste avec d’autres dossiers, un peu épineux, que Gérard Collomb s’est bien gardé d’ouvrir. Que faire des millions d’heures supplémentaires effectuées par les agents qui n’ont été ni récupérées, ni indemnisées ? Et pourquoi la France n’applique-t-elle pas la directive européenne sur le temps de travail qui impose une période minimale de repos de 11 heures consécutives par période de 24 heures ? « Ces dossiers, c’est un peu l’échec de Gérard Collomb, souligne le responsable syndical de l’Unsa. Il va falloir que le nouveau ministre s’y mette. »
Un remplacement par Edouard Philippe « ahurissant »
Du côté des gendarmes, on évoque l’action de Gérard Collomb place Beauvau avec une pointe d’amertume. « Après avoir été maire de Lyon, il connaissait mieux la police que la gendarmerie », souffle Frédéric Lelouette, président de l’association professionnelle GendXXI. Le sous-officier regrette notamment que les effectifs de gendarmes n’aient pas augmenté, depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron, autant que ceux de la police. Il reconnaît que l’ancien ministre « s’est battu pour notre budget, en 2019, qui est correct ». Il aimerait toutefois que son successeur débloque une partie du budget 2018, qui a été gelé, afin de financer l’achat de véhicules neufs et de payer les réservistes.
Frédéric Lelouette attend aussi du futur ministre l’Intérieur, comme ses collègues policiers, qu’il s’attache à simplifier la procédure pénale. « Il n’y a pas eu d’avancée sur le sujet depuis trois ou quatre ans », s’emporte-t-il. Le prochain locataire de l’hôtel de Beauvau a donc du pain sur la planche. Il est urgent qu’il soit nommé, estime Jean-Claude Delage, étonné par la situation actuelle. « C’est très curieux. J’ai du mal à comprendre, concernant un poste aussi important, qu’on n’ait pas réussi à trouver quelqu’un et que cela soit le Premier ministre, déjà débordé, qui fasse l’intérim. C’est un peu ahurissant », soutient le patron d’Alliance. « C’est incompréhensible et pour les policiers, ça crée le doute. »
Un successeur nommé dans « quelques jours »
Plusieurs noms circulent déjà. En particulier celui de Frédéric Péchenard, ancien patron de la police nationale et proche de Nicolas Sarkozy. Ou de Denis Favier, ancien directeur de la gendarmerie, admiré à l’époque par ses troupes. Pour ne pas faire de jaloux, le président de la République pourrait alors porter son choix sur un politique. Un proche, peut-être, pour occuper ce poste hautement sensible. Quelqu’un qui possède de solides réseaux dans la police ou la gendarmerie, et qui connaisse bien le monde de la sécurité. Selon Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement, le remplacement de Gérard Collomb « est l’affaire de quelques jours ».
Source : 20 Minutes
Laisser un commentaire