Le général de Villiers veut «réparer la France» : jusqu’à se présenter à la présidentielle?
Stratégie de promotion librairie ou réelle tentation ? Pierre de Villiers, ancien chef d’état-major des armées, sort un nouvel ouvrage et laisse planer le doute sur d’éventuelles ambitions politiques…
Pierre de Villiers n’a qu’un « seul fil conducteur : l’amour de la France », dit de lui le général Soubelet. LP/Philippe Lavieille
Par Henri Vernet
Revoilà le général de Villiers. Le militaire le plus populaire de France depuis son départ fracassant du poste de chef d’état-major des armées en juillet 2017, sur fond de clash avec le président Macron, sortira le 14 octobre un nouveau livre. Son troisième, déjà. Avec à chaque fois un titre claquant comme un slogan de campagne : « Servir » (2017), « Qu’est-ce qu’un chef? » (2018) et, cette fois, « L’Equilibre est un courage » (Fayard). Le sous-titre en couverture est encore plus intéressant… ou intriguant : « Réparer la France ». Vaste programme.
« J’ai ressenti le déchirement qui s’opère dans notre nation, l’impérieuse nécessité d’une véritable réconciliation nationale », écrit l’officier dans le communiqué de presse délivré par l’éditeur Fayard qui garde au secret l’ouvrage et plus encore son auteur, entretenant le suspense. Que cherche Pierre de Villiers ? Ambitionnerait-il de se lancer en politique, voire d’être candidat à la prochaine élection présidentielle ?
L’hypothèse ne paraît pas absurde. Certes, le général, frère cadet du souverainiste Philippe de Villiers, s’est toujours gardé de tout engagement partisan, même après avoir quitté l’uniforme. Certes, il a poliment décliné l’invitation à rejoindre la liste (divers droite) de l’équipe municipale de son fief familial de Boulogne-Essarts-en-Bocage, en Vendée. Certes, encore, l’homme ne possède ni parti ni réseaux politiques. Certes, enfin, après 40 années sous les drapeaux et sur tous les fronts, il mène une carrière fort gratifiante d’écrivain à succès et de consultant prisé auprès d’entreprises variées.
« Il n’a aucune visée politique »
N’empêche, au plus fort du mouvement des Gilets jaunes, son nom était scandé par des meneurs sur l’air de « Villiers à l’Elysée ». Lorsqu’il faisait la tournée des librairies, bourrées à craquer, il était souvent sollicité entre deux dédicaces. « Des réflexions du genre Mon général, on a besoin de vous! Mais je répondais que je suis un soldat, loyal, et que j’ai trop de respect pour les politiques », confiait alors l’intéressé à notre journal, démentant tout aventurisme politicien. Ce niet est-il inébranlable? Il y a toutes les chances pour que de tels appels à « un homme à poigne » se multiplient lors de la promotion de son nouvel ouvrage.
C’est d’ailleurs d’une telle rencontre publique qu’est né ce livre, « Réparer la France ». Une femme d’une cinquantaine d’années vient le voir, « émue », et lui confie sa « peur » à l’idée que son mari, Gilet jaune, et leur fils, CRS, se retrouvent face à face dans la prochaine manif. D’où l’urgence ressentie par le général de se plonger au plus profond de ce pays sous tension… un peu à la manière, en son temps, du député basque Jean Lassalle.
N’y aurait-il vraiment pas là matière à un programme de candidat à l’Elysée? « Je n’y crois pas une seconde, il n’a aucune visée politique, mais un seul fil conducteur : l’amour de la France », balaie un autre ex-général (de gendarmerie), Bertrand Soubelet, proche de Villiers (lui aussi « malmené par les politiques pour avoir ouvert ma gueule », dit-il). A l’en croire, l’auteur « livre un diagnostic, des clés de lecture pour ceux qui sont aux manettes, mais pas un manifeste ». Le politologue Pascal Boniface, passionné de foot comme le général et parrain avec lui du mouvement « Positive football », est sur la même ligne : « Profondément chrétien, il veut être utile, servir, transmettre aux autres. Je ne le vois pas viser l’Elysée… à moins que beaucoup de monde vienne le chercher. »
« Les excès des écolos, les politiques et les médias sur leur nuage »
« Je sens que ça pourrait bien lui trotter dans la tête », dit un artisan de Boulogne, le village où a grandi la fratrie de Villiers et où le général a sa ferme retapée, la Borderie. « Ça bouillonne des fois quand il vient me voir avec sa vieille 2CV bleue, et peste contre les excès des écolos, les politiques et les médias sur leur nuage. Des paroles, des paroles… avec Pierre, on aurait du concret. »Parmi le millier d’habitants du bourg, chacun appelle l’ex-chef d’état-major par son prénom ; les anciens qui ont joué au foot, gamins, avec « Pierre » et ses frères dans des champs de choux, apprécient qu’il soit resté « si simple et proche des gens ». « Avec ses compétences, sa capacité d’organisation, on ne pourrait pas trouver beaucoup mieux pour le pays, admire Jean-Pierre Mallard, maire de Boulogne. Mais il ne m’a jamais parlé de candidature présidentielle, c’est le genre de sujet qu’il esquive avec un sourire en coin. Il dit beaucoup de choses dans ses livres, je crois que c’est sa façon à lui de faire de la politique. »
Source : Le Parisien
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