Il ne veut pas de plaque “colonel Beltrame” sur le monument aux morts de sa commune

18-03-28-ceremonie-beltrame-17Le cercueil d’Arnaud Beltrame dans la cour d’honneur des Invalides (Crédit:MG/L’Essor)

Si l’on ne parlait pas d’un héros, Arnaud Beltrame, l’affaire serait digne de Clochemerle. Un habitant d’une commune proche de Poitiers veut en effet faire enlever du monument aux morts une plaque en hommage au colonel de Gendarmerie. Motif: l’officier n’a jamais résidé à Fontaine-le-Comte.

Le 23 mars 2018 à Trèbes (Aude), le colonel Beltrame était mortellement blessé par un terroriste après avoir pris la place d’une otage. Son “geste à l’issue incertaine”, selon le mot d’Emmanuel Macron, avait fait de lui un héros. L’émotion avait alors saisi le pays. Des rues et des places, des salles de sport et des écoles avaient été alors baptisées “Colonel Beltrame”. On en compte aujourd’hui plus de 250.

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“Après l’hommage national, nous nous sommes dit au conseil municipal qu’il ne fallait pas oublier cet homme,” raconte à L’Essor Philippe Brottier, maire de Fontaine–le-Comte, commune résidentielle de 4.000 habitants. Pour lui, “le monument aux morts est le lieu commémoratif par excellence d’une commune”. Et, ajoute l’édile, “Arnaud Beltrame aurait pu faire le même geste ici qu’à Trèbes. Il l’a fait pour nous tous”.

Arnaud Beltrame “Citoyen d’honneur de Fontaine-le-Comte”

Le monument aux morts de Fontaine-le-Comte (Vienne) avec une plaque à la mémoire du colonel Arnaud Beltrame qu'un habitant veut faire enlever. (Photo Mairie de Fontaine-le-Comte)
Le monument aux morts de Fontaine-le-Comte (Vienne) avec une plaque à la mémoire du colonel Arnaud Beltrame qu’un habitant veut faire enlever. (Photo Mairie de Fontaine-le-Comte)
Le conseil municipal décide donc, au mois d’avril 2019, de poser une plaque au nom d’Arnaud Beltrame sur le monument, situé devant de l’abbatiale Notre-Dame. L’édifice très sobre porte la mention “A la mémoire glorieuse des enfants de Fontaine-le-Comte morts pour la France”. Et les noms d’une trentaines de soldats, morts principalement pendant la Grande Guerre. Le conseil municipal fera plus tard Arnaud Beltrame “citoyen d’honneur de Fontaine-le-Comte”. “Avec l’accord de la mère de l’officier et des anciens combattants”, tient à préciser le maire.

La plaque est dévoilée le 18 juin, jour anniversaire de l’Appel du général de Gaulle. Elle est vissée sur le bas de l’un des quatre côtés du monument. Une plaque du même marbre que celui où sont inscrits en lettres dorées les noms de 11 Poilus tués pendant la Grande Guerre. Portant les mots “Col. Arnaud Beltrame 24 mars 2018”, elle s’intègre parfaitement au monument.

Philippe Brottier dénonce “une polémique indécente”. Car, assure-t-il, “ce qui est important, c’est le symbole que représente le colonel Beltrame “. De toute façon, conclut le maire, “il n’y avait pas d’autre endroit pour poser cette plaque”. “Faux”, réplique Robert Bonneau, 72 ans, retraité de France Télécom, qui veut faire enlever la plaque. “J’avais proposé au maire de baptiser le gymnase de la commune, colonel Arnaud Beltrame”, dit-il à L’Essor.

Il se défend de tout esprit antimilitariste: “Ma mère était pupille de la Nation et mon oncle est mort pour la France pendant la Seconde Guerre mondiale”. Robert Bonneau ajoute:” Je ne conteste pas du tout l’acte héroïque du colonel Beltrame mais le maire n’a pas respecté la loi”.

Le tribunal administratif de Poitiers saisi

Il envoie donc une lettre recommandée au maire pour lui demander de faire enlever la plaque. A l’appui de sa demande, il cite le code des pensions militaires d’invalidité et victimes de guerre. Ce texte dit clairement que l’inscription au monument aux morts d’une commune, ne peut se faire que dans deux cas: être titulaire de la mention “mort pour la France” et être né dans la commune ou y avoir été domicilié légalement en dernier lieu.

“Le colonel Arnaud Beltrame n’a aucun lien avec Fontaine-le-Comte”, remarque le retraité. “Seuls Etampes, sa ville natale dans l’Essonne, et Ferrials-les-Corbières, son village de résidence dans l’Aude, auraient pu l’inscrire sur leurs monuments aux morts”.

Devant le “silence” du maire, Robert Bonneau se tourne alors vers le tribunal administratif de Poitiers. Le 5 décembre 2019, la cour a examiné cette demande. Le président a souligné le caractère pour le moins inédit de cette demande. Le rapporteur public a dit qu’il fallait écarter la demande de Robert Bonneau. Il a en effet estimé que la plaque de dimension modeste, était apposée sur le bas du monument.

Décision du tribunal dans les tout prochains jours.

Pierre-Marie Giraud

Source : L’Essor.org

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