« Il m’a dit: ‘Tu vas les bouffer' »: quand Benalla se vante du soutien de Macron
Emmanuel Macron et Alexandre Benalla. – AFP
Dans une conversation avec Vincent Crase, ancien salarié de La République en marche, révélée par Mediapart, Alexandre Benalla laisse entendre qu’il est protégé au plus haut niveau de l’Etat. Par ailleurs, le média a obtenu la confirmation que l’ancien chargé de mission travaillait avec un homme d’affaires russe, et ce alors qu’il était à l’Elysée.
C’est une rencontre qui n’aurait pas dû avoir lieu. Mediapart révèle ce jeudi un enregistrement audio de la conversation qu’Alexandre Benalla et Vincent Crase ont eu le 26 juillet dernier. Les deux hommes étaient alors placés sous contrôle judiciaire, à la suite de leur mise en examen pour les violences du 1er-Mai, pour « violences en réunion », qui leur interdisait d’entrer en contact. Loin de se sentir inquiété, Alexandre Benalla semble prendre avec légèreté le début de ses ennuis judiciaires.
Pourtant, à la lumière de ses révélations, les deux hommes pourraient voir leur contrôle judiciaire revu pour le commuter en placement en détention. Le juge d’instruction, qui a prononcé la mise en examen, pourrait délivrer un mandat d’arrêt ou un mandat d’amener ou saisir le juge des libertés et de la détention, seul à pouvoir décider d’une incarcération. Le mis en examen a toutefois la possibilité de faire appel ou faire des demandes de remises en liberté au cours de sa détention.
« T’es plus fort qu’eux »
Lors de cet échange retranscrit par le site d’information, l’ancien chargé de mission se vante de ses relations avec le sommet de l’Etat, et notamment avec le président de la République, Emmanuel Macron, mais aussi Ismaël Emelien, « conseil spécial » de la présidence. Un sentiment de protection ressort de ses propos. Alexandre Benalla parle alors du « patron » pour évoquer le chef de l’Etat, qui ne cachait à l’époque pas son soutien pour le jeune homme de 26 ans. Il évoque alors le soutien du « président, madame (Brigitte Macron, NDLR), Ismaël qui me conseille sur les médias et compagnie ».
« Ah bah il fait plus que nous soutenir (…) Il est comme fou (…) Et il a dit comme ça, il a dit, il m’a dit: « Tu vas les bouffer. T’es plus fort qu’eux. » C’est énorme quand même », se félicite Alexandre Benalla auprès de son ami Vincent Crase, lisant un texto attribué à Emmanuel Macron.
Contacté par Mediapart, l’Elysée a démenti l’existence de ce SMS. Ismaël Emelien nie également tout investissement de sa part pour préparer Alexandre Benalla lors de ses interventions médiatiques.
« Le problème, c’est qu’il y a des flics devant »
Le 26 juillet 2018, jour de cette conversation, l’affaire Benalla n’en est qu’à ses débuts. Les premières révélations du Monde date du 18 juillet, Alexandre Benalla et Vincent Crase ont été placés en garde à vue le 20 et mis en examen le 22. Rien pour inquiéter le premier qui en vient à se vanter de cette affaire, devenue véritable tourbillon politico-judiciaire depuis plusieurs mois. « À 26 ans, si tu veux, y a pas grand monde qui vit… qui provoque deux commissions d’enquête parlementaires, qui bloque le fonctionnement du Parlement… », lance-t-il à son ami. L’ancien chargé de mission fait référence aux commissions d’enquête menées à l’Assemblée nationale et au Sénat pour tenter de savoir s’il n’a pas fait n’a pas été protégé par l’Etat.
Loin de l’assurance d’Alexandre Benalla, Vincent Crase s’inquiète de ce que les enquêteurs pourraient alors saisir lors de leurs recherches. « J’essaierais bien d’y aller cette nuit, mais le problème, c’est qu’il y a des flics devant… », confie l’ancien salarié du parti présidentiel souhaitant se rendre discrètement au siège de LaREM afin d’y faire le ménage. Avait-il des choses à cacher? C’est toute la question que se posent les policiers, surtout après la disparition d’un coffre-fort de l’appartement d’Alexandre Benalla, avant qu’il ne soit perquisitionné.
Des précautions d’autant plus intrigantes de la part d’un Vincent Crase alors confiant pour son avenir judiciaire: « Judiciairement j’ai le… violences volontaires en réunion, elle dit que ça va pas tenir… (…) Je vais prendre du sursis. »
Vincent Crase, discret depuis le début de l’affaire, appelle d’ailleurs son complice à suivre son comportement. « Plus tu dis des choses, plus ça les excite. Là l’intensité médiatique descendait un peu, à chaque fois que tu remets des pièces dans la machine, pour ça repart (…) », intime l’ancien salarié de LaREM, qui tente d’éteindre l’incendie. Depuis le début de l’affaire, et face à l’avalanche de révélations sur ses activités, Alexandre Benalla réagit par voie de communiqué pour se défendre.
Des liens avec un oligarque russe
Depuis son éviction de l’Elysée, Alexandre Benalla a rebondi dans le milieu des affaires. Un domaine dans lequel il semblait déjà être bien intégré. Mediapart apporte le témoignage d’un intermédiaire qui confirme la relation noué entre le jeune homme et un oligarque russe, proche de Vladimir Poutine. Possédant plusieurs propriétés dans le sud de la France, l’homme souhaite changer de société de sécurité. Fin 2017, des négociations sont engagées entre Iskander Makhmudov et Vincent Crase, comme ce dernier l’a confirmé au média.
L’intermédiaire assure toutefois qu’Alexandre Benalla a désigné Crase pour gérer le contrat. Les deux hommes rencontrent l’équipe russe à deux pas du palais présidentiel. En juin 2018, un premier virement est réalisé. Benalla est alors toujours chargé de mission à l’Elysée, Crase à la sécurité de LaREM. « La question d’une éventuelle compromission, en tout cas d’une mise en danger des sommets de l’Etat français avec un homme, je le rappelle à cette époque M. Benalla est soumis au secret défense, proche de M. Poutine », estime Fabrice Arfi, auteur de l’enquête pour Mediapart.
Le 21 janvier dernier, devant la commission d’enquête du Sénat, Alexandre Benalla déclarait: « Je ne l’ai jamais rencontré » au sujet Iskander Makhmudov. Il précise également n’avoir jamais « contribué », ni n’avoir été « intéressé » au « moindre contrat » négocié par son ami Vincent Crase. Il pourrait désormais être poursuivi pour parjure. La sanction peut aller jusqu’à 5 ans de prison et 75.000 euros d’amende
Source et Vidéo : BFMTV
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