Général Bertrand Cavallier : « Le coût des masques était dérisoire sur le budget de l’État ! »
Analyse en profondeur de la crise par un général (2s) de gendarmerie : « On n’était plus dans une logique d’anticipation. La responsabilité collective est énorme. La première préparation est idéologique. » À écouter absolument.
La France choisit de ne pas tester les potentielles victimes du coronavirus. Le confinement a été décidé très tard. Nous semblons finalement peu préparés, alors que nous avions tout le temps nécessaire pour le faire. Sommes-nous entrés en « guerre » trop tard ?
Je resterais prudent quant aux mesures prises sous le signe de l’urgence. Je pense que toute personne se retrouvant aujourd’hui dans la posture d’un gouvernant n’aurait pas nécessairement la solution. J’en appelle donc à une grande pudeur et une grande modestie.
En revanche, il y a un vrai problème de fond. Nous n’étions plus, depuis des années dans ce pays, sur des logiques d’anticipation et de planification véritable des crises. Comme je le dis dans l’article publié par Atlantico, cela provient du diktat de l’instantané. L’immédiat a pris le pas sur toutes les autres considérations. Nous étions dans une espèce de monde Bisounours et aseptisé.
La responsabilité de cet état de fait est évidemment collective. Elle vient bien sûr des gouvernants. La technostructure qui est faite pour cela a également une responsabilité énorme. Et enfin, l’ensemble des citoyens se satisfaisait de cette situation avec son exigence de biens et d’immédiateté, sur fond de consumérisme et d’hédonisme.
La disparition du stock stratégique de masques FFP2 résume-t-elle bien cette crise et le fait que nous ne sachions plus anticiper ce genre de crises ?
Je crois que cet exemple est en effet assez parlant. Cette décision ne peut d’ailleurs pas se justifier par un impératif d’économie. Il s’agit d’un coût de 15 millions d’euros, somme dérisoire par rapport au budget de l’État.
On peut se demander à cette occasion comment est utilisé le budget de l’État au regard de sommes colossales investies dans des actions qui n’avaient d’ailleurs pas beaucoup de sens. Certes, il faut satisfaire des demandes du moment, mais il faut également, conformément à la vocation de l’État, investir dans le futur et prendre en compte tous les scénarios de crise.
Les pandémies avaient été identifiées, notamment par l’État-major des armées, comme un des scénarios plausibles. Or, la réalité démontre qu’il n’y avait plus de préparations réelles. Je ne parle bien évidemment pas des bonnes volontés. Elles sont là. Il y a des comportements exemplaires sur le terrain de la part de l’ensemble des personnels soignants. Ils vont vraiment au front et risquent leurs vies. Il est tout à fait scandaleux et inexcusable de constater qu’ils n’ont pas les équipements élémentaires pour agir.
Après 30 ans en Gendarmerie, j’ai atteint un certain niveau qui m’a permis d’analyser la réalité du système. Alors que le mot « résilience » était à la mode, je m’étais interrogé sur la réelle préparation. Toutefois, comme je l’ai toujours dit, la première préparation est idéologique. Que voulons-nous ? Comment voulez-vous préparer la crise quand vous êtes enferré dans une idéologie fondée sur le primat de l’individu, qui se traduit par le relativisme et par le déni de la réalité ? Raymond Aron avait rappelé aux intellectuels que l’Histoire est tragique. Cette société niait la tragédie, qui est la substance même de l’Histoire, qu’elle s’exprime au travers du terrorisme, d’épidémies ou de guerres conventionnelles. Et je ne parle même pas du déni de réalité s’agissant de ce qui se passe en France depuis des années en termes de délitement du corps social, de violence et de dissidence de zones entières.
Source : Boulevard Voltaire
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