Gendarmerie : « Parole franche et directe » d’un officier
Le commandant Masson au garde-à-vous avec à sa droite, le préfet, n’a pas pratiqué un discours lisse lors de la Sainte-Geneviève.
SAINT-GOBAIN – Le commandant Masson, de la compagnie de Laon, a profité de la Sainte-Geneviève pour dire tout haut ce que ses hommes de terrain pensent tout bas.
D’ordinaire, les discours sont plutôt lisses, politiquement corrects dans ce genre de cérémonies. Mais pas cette fois. A l’issue de la Sainte-Geneviève organisée vendredi soir à Saint-Gobain, le commandant de la compagnie de Laon n’y est pas allé par quatre chemins, en prenant soin de s’adresser à ses militaires en présence… du nouveau préfet de l’Aisne, du patron des gendarmes axonais et de nombreux élus locaux.
« Sans vouloir polémiquer », l’officier a pointé du doigt la justice. « Un bon nombre d’entre vous (ndlr : des gendarmes) sont surpris de telle ou telle décision judiciaire « trop clémente » ou « pas assez éducative », qui ne « rentabilise » pas le travail que cela représente. » Des paroles souvent entendues mais uniquement en « off ». Cette fois, c’est dit ! « Depuis trois ans à votre tête, je vois passer des dossiers concernant les mêmes personnes. Les plus actifs de nos adversaires viennent d’être neutralisés pour la troisième fois… », a-t-il insisté.
« La clémence de la justice »
Quelques minutes plus tôt, le commandant Masson avait évoqué la « très forte augmentation » de la délinquance recensée sur la compagnie (+ 22 %) par rapport à l’année dernière. Plus particulièrement la hausse des atteintes volontaires à l’intégrité physique (menaces de violences), la multiplication par deux des infractions d’outrage ou de violences à dépositaire de l’autorité publique, et l’explosion de cas de falsification et usage de chèques volés. « Ces trois marqueurs illustrent, à mon avis, la tension croissante qui parcourt la société française caractérisée par la primauté de l’individu sur le collectif : paupérisation poussant à briser le verrou moral dans un premier temps, suivie d’une libération de la parole agressive qui s’accompagne de la découverte de la clémence de la justice, pour finalement aboutir à un retournement contre les symboles tangibles de l’autorité. » Ça sent le ras-le-bol !
Des moyens matériels pas toujours disponibles
Celui qui a sous sa responsabilité 148 gendarmes (le peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie, les brigades de Chauny, Anizy, Laon…) a également parlé des conditions de travail de ses gendarmes. « Les moyens matériels à notre disposition sont adaptés à la technologie actuelle. Si dans l’action ou au quotidien, il arrive de regretter qu’ils soient en trop faible quantité, parfois perfectibles ou tout bonnement pas disponibles là et quand il faut (et toc !) il n’en demeure pas moins que toute décision de répartition prend en compte un coût et des besoins. » Quant aux logements, ils « souffrent d’un entretien qui ne se réalise que par à-coup », a-t-il regretté.
Son discours, applaudi par les gendarmes, a surpris quelques élus. « C’est ainsi que l’on parle dans les corps de troupe : d’une parole franche, directe et en visant les tripes », a justifié l’officier.
Reste à savoir si sa hiérarchie et la justice ont apprécié.
Source : L’Aisne Nouvelle
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