François Boulo, le 23 mars 2019, lors de l’acte 19 du mouvement
Hans Lucas via AFP
Par Jean-Loup Adenor
Publié le 14/09/2021 à 17:52
Dans un texte publié sur sa page Facebook ce mardi 14 septembre, l’avocat François Boulo, figure des gilets jaunes, annonce son intention de se « retirer de la vie publique ». Celui qui avait rejoint le mouvement des ronds-points en 2018 se dit aujourd’hui « usé » par les abus des « dominants », mais surtout par les querelles d’ego chez les opposants au système actuel.
Coup de blues chez les gilets jaunes. L’avocat François Boulo, qui s’est fait connaître en prenant fait et cause pour le mouvement des ronds-points, a annoncé mardi 14 septembre sur Facebook, son intention de « se retirer de la vie publique ». Dans un long texte argumenté, intitulé « Bientôt, j’arrêterai tout… et je compte sur vous », il explique « sans filtre et sans détour » être aujourd’hui « usé » par le combat politique. Celui qui avait réussi à se faire accepter des gilets jaunes malgré sa condition – de son propre aveu – de CSP+ « pas à plaindre » met en cause, bien sûr, « l’effondrement généralisé (politique économique, social, écologique » d’un système à bout de souffle, à mettre au crédit des « dominants ». Mais François Boulo étrille surtout les « gourous et charlatans du débat public » qui prolifèrent dans le « camp des « résistants » ».
Et c’est encore sur ceux-là qu’il tape le plus fort. « Du simple citoyen lambda qui vomit sa haine ou répand ses thèses délirantes sur les réseaux sociaux au leader d’opinion, tantôt opportuniste tantôt prisonnier de ses récits extravagants ou hallucinés, tous partagent les mêmes faiblesses », écrit l’avocat. Il faut dire que jusqu’à présent, François Boulo s’était fait plutôt discret, tout particulièrement sur les questions liées au Covid, à la vaccination et au passe sanitaire. Peut-être parce que les lignes entre Gilets jaunes et anti-passe se sont faites plus floues ? Les manifestations du samedi, marque de fabrique du mouvement fluo, ont été reprises par les opposants à la politique sanitaire du gouvernement. Beaucoup, dont les Renseignements territoriaux, évoquent une porosité certaine entre les deux mouvements.
L’éminence grise des gilets jaunes
C’est en novembre 2018 que François Boulo s’est fait connaître en allant à la rencontre, au hasard d’un footing, des Gilets jaunes de sa ville de Rouen. Invité à parler à l’une de leurs conférences, puis sur les plateaux pour défendre les revendications d’un mouvement protéiforme, il est rapidement devenu l’une des égéries de la contestation. Contrairement à un Maxime Nicolle ou un Eric Drouet, l’avocat est précis et d’une rhétorique redoutable. François Boulo travaille beaucoup et ça se voit ; son premier passage télé, en janvier 2020, l’oppose au président du Medef. L’avocat est calme, clair : « Ce que souhaitent les gens, c’est que soient remis en cause tous les dispositifs fiscaux qui sont au bénéfice des 1 % les plus riches. C’est-à-dire l’ISF réformé, la flat tax, l’exit tax et le CICE, captés pour moitié par les plus grandes entreprises. L’ensemble de ces cadeaux fiscaux, c’est 20 milliards en 2018 et 30 milliards en 2019. » La vidéo fera plus de 180 000 vues sur YouTube.
Mais depuis, la crise sanitaire a cassé l’élan qu’étaient parvenus à entretenir les gilets jaunes et le mouvement semble avoir fait le plein de nouveaux penseurs et de personnages médiatiques. « Si je n’en veux pas à tous ceux qui écrivent seuls sur leur clavier car ils sont victimes d’un système qui écrase les individus, je ne peux pas en dire autant de ceux qui prétendent porter le flambeau de la résistance et ne recherchent en réalité que la lumière des projecteurs », accuse encore François Boulo dans son texte, dénonçant à demi-mot, la désinformation et les théories du complot qui gangrènent les réseaux sociaux, jusqu’à alimenter la contestation, pourtant saine, des restrictions sanitaires. « Tout n’est plus que cacophonie, entre polémiques stériles et règlements de compte personnels ou partisans regrette-t-il. Dans cet océan de bêtise et de paresse intellectuelle, les voix rationnelles s’éteignent peu à peu. »
« Aujourd’hui poursuit l’avocat, il suffit pour les beaux parleurs de conforter les opinions et les émotions de tous les désespérés pour s’attirer une certaine popularité confinant parfois à une adulation sans limite. » Un phénomène qui parasite selon lui le combat politique et ne peut mener qu’à « l’impasse ». Alors basta : il ira au bout de ses objectifs – écrire un livre et publier une quinzaine de vidéos sur « le système politique actuel » – après quoi, il aura « fait sa part ». Ses derniers conseils ? « Lâchez votre téléphone ! Pensez, débattez, instruisez-vous ! Là est notre salut. »
Source : Marianne
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