Fondation Hippocrate – Primum non nocere

Chers lecteurs,

Ici Eric Ménat, président de la Fondation Hippocrate.

Je voudrais dire un mot sur la lettre de Jérôme de cette semaine, car c’est un sujet qui me tient à cœur.

Le grand public ne s’en rend pas compte, mais la médecine est de plus en plus décidée dans les salons ministériels et les couloirs des agences de santé, et imposée aux médecins de terrain.

Nous, médecins, avons fait 10 ans d’études et nous sommes, je crois, des professionnels responsables et pourtant, on nous explique de plus en plus comment nous devons faire notre travail. On nous l’impose, même, avec des obligations et des interdictions par décret.

Comme si tous les malades se ressemblaient, comme si les décideurs, dans leurs bureaux parisiens, connaissaient mieux nos malades que nous qui sommes quotidiennement à leur contact.

Et l’apparition de centres de santé basés sur l’intelligence artificielle et où les médecins seront des salariés cantonnés au rôle de simples exécutants ne va rien arranger.

Les usagers de la santé n’y trouvent plus leur compte. Et les soignants non plus. Les démissions succèdent aux burn-out et on nous promet un été dramatique sur le plan de l’organisation des soins.

Cette situation a abouti à une absence de prise en charge des malades du Covid. Face à ce drame humain, le Dr Louis Fouché a proposé la mise en place d’un réseau Covisoins qui a pu ainsi aider, soulager et soigner des milliers de malades.

La lettre de ce mois-ci de notre Fondation vous l’explique en détail, ci-dessous.

Notez bien que ce projet a vocation à perdurer, bien au-delà du Covid.

Nous voulons rapprocher les soignants et les soignés. Nous voulons mieux faire collaborer tous les soignants, quelles que soient leurs pratiques. Nous voulons permettre aux patients de s’impliquer afin qu’ils deviennent réellement acteurs de leur santé. C’est la clé pour que chacun améliore son espérance de vie tout en soulageant notre système de santé à l’agonie.

C’est un gros challenge, mais qui dépend de chacun d’entre nous. C’est bien à nous, citoyens, usagers de la santé d’agir pour notre avenir !

Dr Eric Ménat

***

Médecine et soins : après la débâcle, la reconstruction ?

Par les temps qui courent, être optimiste est plutôt mal vu. Les écrans de télévision diffusent en continu des informations plus anxiogènes les unes que les autres. Devant le téléspectateur hypnotisé, les récits catastrophes s’enchaînent : crise sanitaire, crise ukrainienne, risque de guerre nucléaire, crise écologique et, qui sait, crise alimentaire et économique demain ?

Certains parlent désormais de crise systémique1. Selon cette hypothèse, les difficultés s’enchaînent parce que la matrice globale qui régit le monde n’est plus adaptée aux défis humains. Homo sapiens peinerait à rentrer pleinement dans le XXIe siècle en laissant derrière lui les modèles illusoires du XXe siècle : consommation de masse, exploitation sans discernement des ressources de la planète, spéculations sur le vivant, les denrées alimentaires, les données en tout genre ou encore la santé humaine, etc.

Permettez-moi cependant, de reprendre avec vous l’étymologie du mot crise. Il vient du grec, krisis qui signifie action ou faculté de choisir2. Nous vivons donc peut-être une période de préparation à des temps meilleurs.

En ce moment même en France, il se passe une petite révolution dans le domaine de la santé dont les médias ne parlent pas.

Les modes de soins pourraient être durablement transformés par une poignée de soignants, de médecins et de citoyens pour qui le temps est venu d’agir et de changer la matrice.

Il y a du reste urgence à agir car l’hôpital public en France est en panne et les soignants quittent le navire.

Ces lits que l’on supprime à l’hôpital…

Depuis le début de la crise sanitaire, 5700 lits d’hôpital ont été supprimés. Les autorités de santé justifient ce choix par la création de 2000 lits de réanimation, dont le coût est plus élevé3.

En réalité cependant, les lits d’hôpital ne sauraient être dissociés des soignants. Lorsque l’administration parle d’un lit, cela renvoie aux personnels soignants qu’il faudrait pour accompagner le patient qui s’y trouverait allongé. 20% des lits d’hôpitaux seraient fermés en raison d’un manque d’infirmiers et de médecins. Le vrai enjeu de l’hôpital est là : les soignants manquent à l’appel4,5.

Or, dans le même temps, au moins 15 000 soignants ont été suspendus parce qu’ils ont refusé le vaccin expérimental contre la Covid-19. Ils ont vécu cette décision comme une punition et un rejet, d’autant qu’au début de la crise ils ont été envoyés à l’hôpital même lorsqu’ils avaient été testés positifs à la Covid-19 !6,7

Un constat ancien et des soignants en manque de souffle

La crise de la Covid-19 n’aura été qu’un révélateur d’une situation hospitalière et sanitaire déjà fragile. En 2017, l’émission Envoyé spécial et le site d’investigation Mediacités avaient révélé l’existence de très nombreux dysfonctionnements à l’hôpital. L’affaire avait fait grand bruit et avait été appelée le « CHU leak »8.

26 000 fiches internes rapportant des incidents plus ou moins graves à l’hôpital avaient fuité. Ces documents faisaient état de problèmes tels que des pannes de matériel, des conditions de travail dégradées ou des questions de manques d’effectifs. Ces documents montraient déjà les limites du système hospitalier français. Les termes de « maltraitance » et de « mise en danger des patients » ressortaient de ces fiches[8].

Quelques années plus tard, la situation a plutôt empiré. Pour des salariés dont la vocation professionnelle est de soigner les patients, la différence entre leurs aspirations et la réalité du terrain peut être très déprimante.

En 2021, un sondage effectué auprès de 400 médecins et infirmiers indique que 98% d’entre eux auraient déjà connu l’épuisement professionnel. 7 soignants sur 10 seraient proches du burn out !9. La profession connaît un taux de turn over très fort, notamment en EHPAD et à l’hôpital.

L’exemple du CHU St Louis de La Rochelle

À ce jour, il n’existe pas de volonté politique pour changer la situation de l’hôpital, des soignants et des patients. Il y a longtemps que les autorités publiques sont au courant de ce qui se passe et qu’elles gardent le même cap.

Ainsi, en juillet 2019, Agnès Buzyn alors ministre de la Santé décide d’aller visiter le CHU de la Rochelle. 150 grévistes l’attendent de pied ferme. Ils manifestent avec des panneaux où l’on peut lire « Urgences à l’agonie » ou « Pour être soignés, prenez la journée  ! ». Ils scandent des slogans du type « Des moyens pour l’hôpital  ! », « L’hôpital n’est pas à vendre  ! » ou encore « Hôpital en colère »10,11.

Aucune des revendications de ces manifestants ne sera réellement prise en compte. Sans surprise, l’année d’après en 2020, au début de la crise sanitaire, l’hôpital de la Rochelle est submergé. Très vite le CHU St Louis ne peut plus recevoir de patients venus d’ailleurs par train médicalisé. En avril 2021, puis en 2022, le CHU est à nouveau saturé. 2023 sera-t-elle différente ?12,13,14

Penser autrement pour agir mieux

Les autorités publiques ont semblé manquer d’imagination pour faire face à l’épidémie de coronavirus. Très vite, elles ont estimé qu’il ne pouvait y avoir de traitement possible de cette pathologie. L’hydroxychloroquine défendu par le Pr Didier Raoult de l’IHU de Marseille a été interdite, puis déconseillée. Ce fut le cas d’autres traitements tentés par des médecins de ville, notamment l’ivermectine. Les autorités sanitaires ont conseillé aux populations de rester chez elles et de consommer du doliprane en cas de symptômes. Entre l’apparition de ces derniers et le passage éventuel aux urgences, aucun traitement n’était envisagé.

Le gouvernement a mis tout son espoir dans les mesures restrictives de liberté (confinements, couvre-feux, pass sanitaire) et un vaccin expérimental. Curieusement, les médias traditionnels ont tous soutenu cette approche. Des journaux comme Le Figaro ou Libération ont défendu exactement la même ligne, relayant généralement les informations de l’AFP ou de BFM TV, sans jamais les analyser ni les contredire.

Aux yeux de nombreux médecins et citoyens, la pluralité médiatique a disparu avec la Covid-19. Dans ce contexte, sont apparus de nouveaux médias alternatifs, comme Réinfocovid qui réunit plus de 3000 médecins et de nombreux citoyens. Le Dr Louis Fouché est l’un des fondateurs de ce réseau15. Cette volonté de proposer autre chose a aussi fait naître CoviSoins.

Qu’est-ce que CoviSoins ?

D’après Louis Fouché, l’idée est de sortir de la critique. CoviSoins est avant tout une action alternative, quelque chose de positif ! La priorité n’est-elle pas de permettre à tous les patients touchés par la Covid-19 d’être soignés efficacement ?16

Aujourd’hui, CoviSoins rassemble 120 médecins environ, issus de Réinfocovid. C’est une approche pluridisciplinaire. Un ou plusieurs médecins sont associés à différents soignants. Ces équipes sont réparties par département et même pas communautés de communes sur l’ensemble du territoire. Elles proposent un accompagnement ambulatoire pour les personnes atteintes de Covid-19, c’est-à-dire un accompagnement de médecine de ville pour les malades[16].

Parmi les traitements proposés, certains font l’objet d’un consensus médical très large. En effet, le trio corticoïdes, oxygène et coagulants serait efficace pour aider les patients touchés par la Covid-19. Pour ce suivi, l’hôpital n’est pas nécessaire. Les médecins peuvent ainsi prescrire un traitement adapté à chaque situation et même faire venir de l’oxygène à domicile. Les autres soignants de Covisoins et en particulier les infirmier-ères vont à domicile vérifier que le patient va bien, ils peuvent mesurer leur saturation en oxygène. Mais le système de collaboration locale va plus loin car les autres membres de covisoins peuvent prendre des nouvelles par téléphone pour que les malades ne soient pas laissés seuls face à leurs angoisses mais aussi leur procurer de l’aide pour faire des courses ou simplement aller chercher leurs médicaments[16].

Une solution pour alléger le poids qui pèse sur les hôpitaux ?

Le réseau CoviSoins, malgré ses moyens limités, a soigné jusqu’à 1000 patients Covid-19 par jour. C’est déjà conséquent. Si le gouvernement et les autorités de santé soutenaient l’initiative, des milliers de médecins pourraient s’y mettre. L’hôpital ne serait plus saturé. La situation des soignants et des patients y serait meilleure[16].

CoviSoins dispose d’un secrétariat qui coordonne l’activité de ses équipes. Cinq groupes de travail lui sont associés qui couvrent différentes thématiques comme la prévention, l’aide aux soignants ou l’aspect curatif. Les scientifiques ou experts membres de ces groupes de travail proposent des prises en charge type, des fléchages de patients, des cahiers de suivi des patients ou encore des conseils surtout en matière de prévention[16],17.

CoviSoins est plus qu’une aide aux patients. C’est un embryon de système de santé alternatif.

Une vision pour l’avenir

Les premiers retours que l’on trouve sur Internet liés au travail de CoviSoins sont positifs : patients et soignants semblent satisfaits de la formule[17],18. Ce qui plaît, c’est l’humanité et l’efficacité des soins. L’attente est moins longue qu’ailleurs, l’approche est plus souple, moins administrative.

D’après Louis Fouché, les Agences Régionales de Santé pour l’heure ne semblent pas opposése au projet. Au contraire, certaines d’entre elles aimeraient se joindre à l’initiative. Elles craignent toutefois que le gouvernement ne s’y oppose{16].

En tout cas, les fondateurs de CoviSoins y croient. Ils ont même prévu une suite au cas où, par bonheur, la Covid-19 reculerait. Dans ce cas, les unités constituées retrouveraient une vocation plus généraliste. Elles pourraient notamment aider, chez eux, de nombreux patients à prévenir ou accompagner des maladies de civilisation comme le diabète, l’hypertension, Alzheimer et les maladies dégénératives, des maladies chroniques ou même certains cancers. Pour l’heure elles sont déjà en train de prendre en charge les Covid longs mais aussi les personnes qui pensent avoir des complications vaccinales et qui ne sont pas reconnues comme telles.

Dans ce cas, la pluridisciplinarité de ces équipes constituerait un avantage même si d’un territoire à l’autre les compétences représentées dépendent des thérapeutes disponibles. CoviSoins deviendrait alors Optisoins. Ce serait le fer de lance de la politique de prévention en France !

Des équipes motivées, solidaires, rapides, disponibles et humaines pourraient répondre à de nombreuses demandes de patient sur l’ensemble du territoire. Ce serait un pas de géant dans la bonne direction.

Évidemment, pour qu’un tel dispositif puisse être pleinement déployé, il faudra à un moment donné que les pouvoirs publics donnent leur feu vert. Est-ce possible ?

Qui vivra, verra.

Jérôme

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