Faute de budget, le GIGN va perdre la capacité de descente en corde lisse d’un hélicoptère
Le seul entraînement qui n’est pas réalisable par les moyens de gendarmerie, c’est la descente en corde lisse, a fait observer l’ancien directeur général de la gendarmerie nationale, le général Richard Lizurey. (Crédits : GIGN)
Depuis un peu plus d’un an, le GIGN ne peut plus s’entraîner pour des raisons financières avec le Groupement interarmées d’hélicoptères. Pour 500.000 euros…
Article complété lundi 4 novembre à 9h30
Pour 500.000 euros seulement, le GIGN, mondialement connu, ne peut plus s’entraîner à descendre en corde lisse d’un hélicoptère. Ce qui est problématique pour cette unité d’élite, qui doit logiquement savoir intervenir à partir d’un hélicoptère dans les conditions les plus difficiles. « Nous sommes en train de perdre la capacité de descente en corde lisse d’un hélicoptère de manœuvre par le GIGN car il faut un entraînement récurrent. Cela représente une dépense de 500.000 euros et nous nous heurtons à une limite budgétaire », a expliqué début octobre à l’Assemblée nationale l’ancien patron de la gendarmerie, le général Richard Lizurey.
« Pour ce qui est de la capacité de descente en corde lisse, c’est bien évidemment erroné, les entraînements avec les hélicoptères légers du @Forcesaeriennes répondant très largement aux besoins de maintien des capacités individuelles des hommes du #GIGN et des AGIGN (les antennes GIGN en France et en outre-mer, ndlr) », a réagi le commandant du GIGN dans un tweet publié dimanche.
Depuis un peu plus d’un an, le GIGN ne peut plus effectivement s’entraîner pour des raisons financières avec le GIH (groupement interarmées d’hélicoptères), dont pourtant il en a la responsabilité. Et le GIGN ne dispose pas d’alternative pour l’entraînement. Le GIH avait été créé en 2006 pour favoriser la projection du GIGN en vue de protéger les centrales nucléaires, à l’époque où n’existaient pas les pelotons de sécurité et de protection des centrales (PSPG), créés en 2009.
Un blocage financier
Pourquoi une telle situation incroyable ? Le seul entraînement qui n’est pas réalisable par les moyens de gendarmerie, c’est la descente en corde lisse, a fait observer l’ancien directeur général de la gendarmerie nationale. Or, les armées considèrent que la gendarmerie nationale, qui a été rattachée en 2009 au ministère de l’Intérieur, doit rembourser les coûts résultant de l’emploi par le GIGN de sept Puma du GIH (cinq hélicoptères de l’armée de Terre et deux de l’armée de l’air) pour les missions d’entraînement.
Faute de paiement, les armées ont donc suspendu la participation du GIH aux missions d’entraînement du GIGN. Ce qui fragilise les compétences aéromobiles de ce dernier, notamment dans le cadre d’une opération de grande ampleur. De son côté, le RAID prend lui en charge le financement des heures de vol effectuées dans le cadre de sa préparation opérationnelle. « La raison en est indigne puisqu’il s’agit d’un conflit financier sur la prise en charge budgétaire de la préparation opérationnelle des unités d’élite de la gendarmerie », ont regretté deux députés Jean-Jacques Ferrara et Christophe Lejeune dans un rapport d’information.
« En ce qui concerne les hélicoptères utilisés au profit de la gendarmerie, le règlement de certaines sommes dues par le ministère de l’intérieur est attendu, et nous sommes en discussion avec la place Beauvau sur ce point, a expliqué la ministre des Armées Florence Parly lors de son audition début octobre à l’Assemblée nationale. (…) Une chose est certaine, c’est que lorsqu’il y a des dettes, celles-ci doivent être apurées, comme le veut l’adage selon lequel les bons comptes font les bons amis – or les gendarmes sont nos amis… »
Les deux rapporteurs envisagent trois explications : « soit le ministère des Armées ne devrait pas attendre de prise en charge financière de ces heures ; soit des oppositions internes à la DGGN (Direction générale de la gendarmerie nationale, ndlr) conduisent à pénaliser le GIGN ; soit il a été décidé, au sein du ministère de l’Intérieur, de réserver au RAID la capacité d’emploi du GIH, notamment en raison de l’implantation territoriale du GIGN au travers de ses antennes ».
Des discussions entre la gendarmerie et les armées
Pour le général Richard Lizurey, « il faut remettre le GIH en perspective ». Il n’hésite pas à « trouver des solutions de projection en matière d’interventions opérationnelles pour nous passer du GIH ». C’est dans ce cadre qu’il a récemment rencontré le chef d’état-major des armées, le général François Lecointre, ainsi que le nouveau chef d’état-major de l’armée de terre, le général Thierry Burkhard, pour échanger sur ce sujet. « Nos directions et nos états-majors y travaillent », a-t-il également révélé.
« Les armées attendent de nous, à juste titre, une demande capacitaire, autrement dit, de savoir de quoi nous avons besoin, a expliqué l’ancien patron de la gendarmerie nationale. J’ai besoin d’un vecteur de projection. Peu importe que ce soient des hélicos ou des avions, j’ai besoin de projeter des forces. Nous travaillons donc plutôt sur une demande capacitaire affinée, comme la projection des gens de Satory à tel ou tel endroit et en tant de temps. Ce sont d’ailleurs plus des projections de province à province, d’antennes GIGN vers des lieux d’emplois, que des déplacements de Satory vers le sud de la France. Pour intervenir dans le sud de la France, il vaut mieux faire appel à l’antenne du GIGN de Toulouse ou d’Orange plutôt que de faire venir des gens de Satory », où est basé le GIGN.
Le commandant du GIGN a également tenu à mettre les choses au point dans un tweet publié dimanche : « La projection n’est qu’une partie du sujet et aucun avion ne répondra jamais à la nécessité de manœuvre : appui feu, dépose, récupération. Quant à la projection des hommes des AGIGN, essentielle pour assurer une première réponse, les moyens du CFAG (Commandement des Forces Aériennes, ndlr) y suffisent ».
Source : La Tribune
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