Étudiant éborgné à Rennes : Le Défenseur des droits demande des poursuites contre deux policiers
ENQUETE Touché par un tir de LBD lors d’une manifestation contre la loi Travail en 2016, Jean-François Martin a perdu l’usage de son œil gauche
Touché par un tir de LBD lors d’une manifestation contre la loi Travail en 2016, Jean-François Martin a perdu l’usage de son œil gauche. — DAMIEN MEYER / AFP
- Touché par un tir de LBD lors d’une manifestation contre la loi Travail en 2016, un étudiant rennais avait perdu l’usage de son œil gauche.
- Le Défenseur des droits Jacques Toubon a demandé des poursuites disciplinaires contre deux policiers.
- Il estime qu’ils ont fait « un usage disproportionné » de leur arme ce jour-là.
La manifestation contre la loi Travail avait été violente le 28 avril 2016 à Rennes. Lors des échauffourées avec les forces de l’ordre, un étudiant en géographie alors âgé de 20 ans avait été touché par un tir de LBD, perdant l’usage de son œil gauche. Saisi par le jeune homme, le Défenseur des droits a réclamé des poursuites disciplinaires contre deux policiers pour « usage disproportionné » de leur lanceur de balles de défense.
Au moment des faits, deux fonctionnaires de police, un brigadier-chef et un gardien de la paix, avaient utilisé leurs armes mais « il est impossible de déterminer avec certitude l’auteur du tir ayant atteint » la victime, indique Jacques Toubon dans une décision du 10 décembre 2019. « J’ai l’intime conviction que le monsieur qui m’a tiré dessus sait très bien qu’il m’a tiré dessus et qu’il se protège », assure de son côté Jean-François Martin.
Les conditions d’usage du LBD « pas réunies » selon lui
Au moment de tirer, les policiers étaient éloignés « de 35 à 48 mètres » des personnes visés, alors que « le tir optimum se fait sur une distance de 30 mètres », selon le Défenseur des droits. En outre, les personnes ciblées se trouvaient « sur la rive opposée » de la Vilaine « en groupe compact composé de lanceurs de projectiles se trouvant au milieu de manifestants pacifiques ».
« La séparation par un cours d’eau des fonctionnaires de police auteurs de tirs avec les personnes ciblées empêchait de facto toute assistance aux potentielles personnes touchées », souligne-t-il, estimant ainsi que les conditions permettant l’usage des LBD « n’étaient pas réunies ».
Le réquisitoire du parquet se fait attendre
Le Défenseur des droits remarque aussi qu’« aucun élément de preuve ne vient démontrer » que la victime « était à l’origine de jets de projectiles ». Le Défenseur des droits rappelle en outre sa demande, formulée dès janvier 2018, d’interdire les LBD dans l’arsenal du maintien de l’ordre.
Un juge d’instruction a placé les deux policiers sous le statut de témoins assistés, selon Jean-François Martin. Mais le parquet de Rennes n’a toujours pas rendu son réquisitoire « 16 mois après la notification de fin d’instruction », ajoute-t-il. « Cela questionne sur l’importance que la justice accorde à quelqu’un qui a perdu un œil à cause de la police », estime le jeune homme.
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