Déménagement ubuesque au commissariat de police – Dinan
De haut en bas et de gauche à droite : À 10 h, le commandant de police, Jean-Marc Urvois (à droite) a passé le pouvoir au commandant de gendarmerie Nicolas Catroux (à gauche). 13 h, les policiers ne contrôlent plus la ville. Pincement au coeur au moment de quitter le commissariat. On embarque ses effets personnels. Les policiers déménagent, les gendarmes emménagent… Difficile de s’y retrouver dans le commissariat.
Dans le flou total, les policiers ont quitté la ville, hier, pour laisser place aux gendarmes. La fin de 129 ans de présence policière.
Reportage
Emménager pendant un déménagement. Rien de tel pour créer une véritable pagaille. Une situation ubuesque qui s’est jouée, hier matin, au commissariat de police de Dinan. Après la publication du décret officialisant la fermeture du bâtiment, les policiers avaient 24 heures pour quitter les lieux.
Que faire des armes?
D’un commun accord avec les gendarmes qui prennent leur place, les policiers ont décidé de rendre leurs clefs à 13 h, hier.
Dès 8 h, la valse entre les policiers et les gendarmes a commencé. Dans le flou le plus total. Pas de déménageurs. Pas de camion. Et une multitude de questions qui restent en suspens. Que faire des armes ? Des ordinateurs ? « On ne sait pas du tout. Personne de notre hiérarchie ne nous a prévenus de la marche à suivre. C’est honteux ! » lance un policier en colère. Le commandant Urvois, un portrait du cardinal Richelieu et une épée sous le bras, fait des allers-retours entre son bureau et sa voiture pour vider son bureau.
Derrière un sourire de façade, le chef des policiers en a gros sur le coeur : « Je voudrais juste dire que je suis fier de mon équipage. »
Une cérémonie qui n’en est pas une
Quelques minutes auparavant, le commandant Urvois a serré la main du commandant de gendarmerie Nicolas Catroux, en guise de passation de pouvoir. Pas de cérémonie, pas d’élus, pas de discours. Même les policiers ont préféré rester à l’intérieur.
Dans son bureau, où des paysages bretons sont encore accrochés au mur, le syndicaliste Michel Ogier fulmine. « On apprend une fermeture le vendredi à 16 h 30 par mail, pour le lundi matin. C’est lamentable. J’avais une convoquée moi ce matin. »
Une phrase assassine
Ses collègues défilent pour le féliciter. Depuis le matin, la phrase assassine du policier dinannais à l’égard du ministre de l’Intérieur tourne en boucle sur les radios. « J’ai dit que Manuel Valls s’était comporté comme un petit joueur de 3 e division de football plutôt que comme un attaquant de Ligue 1. Visiblement, ça ne lui a pas plu. Je suis écoeuré du mépris de notre administration. »
Travail ou… pas?
Justement arrive le commissaire Nicolas Guerrand, adjoint au directeur départemental de la sécurité publique. Les policiers en civil se pressent autour de lui pour avoir des réponses à leurs interrogations.
« Vous prenez vos nouvelles affectations mercredi matin, donc demain, vous êtes censés venir travailler », annonce-t-il. « Mais pour quoi faire, protestent les policiers. Les gendarmes sont là. On va rester à se tourner les pouces en les regardant ? » Information contredite deux heures plus tard : « Finalement, comme le décret est à effet immédiat, vous n’auriez pas dû travailler ce matin. » Rires jaunes et protestations. Les policiers ont l’impression d’assister à une mascarade.
Le coeur gros
Derrière la cloison, la vie continue au commissariat. Les gendarmes se sont installés dans un bureau pour recevoir les plaintes. Juste en dessous d’une affiche « Contre la fermeture du commissariat de Dinan ». Ils accueillent les citoyens qui observent, déroutés, le manège entre les policiers et les gendarmes. « Heureusement que c’est écrit dans leur dos. Sinon, on ne sait pas qui est qui », s’amuse une quinquagénaire.
13 h. Les policiers quittent petit à petit le commissariat. Ils ont du mal à se quitter. Le commandant Urvois, le coeur gros, lance un au revoir à la cantonade. C’est la fin de 129 ans d’histoire policière à Dinan.
Émilie CHASSEVANT.
Source : Ouest-France
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