D’anciens proches du comité Traoré accusent Youssouf Traoré de menaces de mort
En avril 2019, le frère d’Assa Traoré a menacé plusieurs femmes proches du comité Traoré via Facebook, avec la complaisance du militant Taha Bouhafs, qui les a exhortées à ne pas porter plainte.
« Je pose ça la… 1 an après… Marre de ne rien dire… ». Ainsi commence le long message posté lundi 31 aout sur Facebook par une certaine Fatiha L., capture d’écran à l’appui. La jeune femme, qui se dit sympathisante du combat contre les violences policières mené par Assa Traoré, explique avoir été menacée de mort par Youssouf Traoré, le frère d’Assa Traoré et d’Adama Traoré, déjà jugé en 2016 pour menaces de mort, outrages et violences à l’encontre de huit gendarmes et policiers, mais également en 2017 pour trafic de drogue. Proche du comité Traoré, Youssouf Traoré (alias Yssouf) s’est notamment impliqué par le passé dans la vente des t-shirts « Justice pour Adama », à leur lancement en 2016, ainsi que par sa participation aux manifestations.
L’affaire a commencé sur Facebook, l’année dernière, avec la publication d’un message le 29 avril 2019 hostile à Assa Traoré publié par un certain Ahmad Nougbo, militant panafricain et membre de la brigade antinégrophobie. « Il faudra bien qu’un jour on se penche sur le cas de cette femme puisqu’elle se présente comme un personnage public, luttant contre les violences policières dans les cités. Et de ce fait on a certes le droit de la soutenir, mais aussi celui de la critiquer » explique l’internaute avant de développer ses critiques point par point. Critiques auxquelles se sont joints de nombreux internautes, dont Fatiha L., qui s’est ainsi exposée aux foudres de Youssouf Traoré, qui aurait dès lors « menacé tous ceux qui ont dit dans un post ce qu’ils reprochaient à sa sœur [Assa] ». Les messages de menaces ont été envoyés par Facebook par Youssouf Traoré, ainsi que par un de ses amis, à la demande de sa sœur Assa Traoré, si l’on en croit les plaignantes.
Contactée par Valeurs actuelles, une autre victime de Youssouf Traoré et de Dooums Djiola confie sa stupeur et sa colère, un an après avoir reçu elle aussi des menaces. « C’est une famille très bizarre. J’ai pourtant toujours été avec eux depuis le début dans leur combat mais il y beaucoup de choses cachées dans le clan Traoré, beaucoup de manigances, que l’on n’a pas le droit d’évoquer sous peine de se faire menacer. Mais je n’ai pas peur d’eux, j’ai de la famille moi aussi » explique Farah (son prénom a été modifié), qui a connu personnellement Assa Traoré. L’origine des tensions qui entourent la famille Traoré viendrait d’une rivalité avec la militante de banlieues et fondatrice du collectif des « familles des victimes tuées par la police », Amal Bentounsi, dont l’engagement contre les violences policières est antérieure la mort d’Adama Traoré et l’ascension d’Assa Traoré comme figure de contestation contre la police.
Dans l’univers militant des banlieues, nombreux sont ceux qui reprochent à Assa Traoré sa surexposition médiatique et l’instrumentalisation de son combat au profit de son clan, le comité Traoré. « Tout a commencé à cause des t-shirt Adama Traoré » détaille Farah, et se serait notamment aggravé lorsqu’Assa Traoré a décidé avec son comité de créer des sacs en toile à son effigie, et non à celle de son frère défunt. Les tensions se sont également cristallisées début 2017, au moment de la marche « pour la justice et la dignité » organisée par Amal Bentounsi, à laquelle Assa Traoré a refusé de se rendre au prétexte que la jeunesse de banlieue n’y était pas conviée. « Ils ont même interdit aux organisateurs de prononcer le nom d’Adama Traoré » témoigne encore Farah.
Toujours selon elle, « Assa Traoré s’est entourée de personnes malsaines qui ont cherché la lumière et pris la grosse tête », au point que le petit noyau initial réuni autour d’elle a rapidement éclaté. « Almamy Kanouté et Youssef Brakni ne supportent pas la concurrence » ajoute Farah, à propos de deux membres influents du comité. Le second, Youssef Brakni, fut notamment grand argentier de la cagnotte en ligne, comme nous le révélions dans un précédent article. Selon les captures d’écrans que nous avons récoltées, la compagne de Youssef Brakni, Fatima Ouassak, cofondatrice du collectif Front de mères, aurait elle aussi l’insulte et la menace faciles. Elle s’en serait prise à l’une des victimes de Youssouf Traoré, avec le soutien du comité Traoré, sur la base d’un désaccord religieux. Voici l’un des messages qu’elle a envoyés : « Mais va mourir, je m’en bats la race de ton pardon de merde, attends que je t’attrape, tu vas voir que moi je fais passer genre l’illicite pour le licite. »
Le militant Taha Bouhafs les incite à ne pas porter plainte
Selon Farah, des dizaines de personnes auraient subi ces intimidations. « Dès qu’il y a un problème, ils envoient quelqu’un. » Parmi les fervents soutiens du comité Traoré n’hésitant pas à monter au front de l’intimidation, on retrouve également le militant Taha Bouhafs (dont nous évoquions cet été les vacances en compagnie d’Assa Traoré, à Marseille, vêtus du t-shirt « Justice pour Adama »). A l’une des femmes qui se plaignait des menaces de Youssouf Traoré sur Facebook et déclarait vouloir porter plainte, Taha Bouhafs lui répond : « Ça veut porter plainte contre un frangin déjà incarcéré. Bien les militants 2.0. » Et d’ajouter : « Je [ne] parle pas aux collabos, va te cacher et ne te dis plus jamais militante, vieille folle. »
« S’il m’arrive un truc après ce post ça sera lui car il m’a menacé de ne plus parler… Bref je laisse une preuve sur mon mur donc tu n’as pas intérêt à me toucher… De toute façon si tu me touches les amis de mon grand frère Allah y ahmou sont prévenus, ils feront un tsunami de votre quartier. C’est des anciens et ils ne rigolent pas avec les mecs qui menacent les femmes » conclut Fatiha L. dans son message Facebook du lundi 31 août.
Contactée par Valeurs actuelles via Facebook, Fatiha L. explique ne pas vouloir nous répondre et publie dans la foulée un message sur son mur : « Valeurs actuelles c’est pas la peine de me contacter, vous avez cru j’étais une Marie Charlotte ou quoi ? 99% des articles que vous faites sont contre ma religion ! Moi c’est Fatiha Musulmane Africaine Algérienne Kabyle Berbère ». L’avocat de la famille Traoré, maître Yassine Bouzrou, s’est quant à lui refusé à tout commentaire.
Source : Valeurs Actuelles
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