Criminalité. La réponse high-tech des gendarmes

Criminalité.  La réponse high-tech des gendarmes
Criminalité. La réponse high-tech des gendarmes Criminalité. La réponse high-tech des gendarmes
Le Télégramme a pu visiter en avant-première le tout nouveau centre high-tech de la gendarmerie, inauguré aujourd’hui à Pontoise (Val d’Oise) par le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve. Cybercriminalité, renseignement criminel, génétique : le pôle judiciaire regroupe ses experts les plus pointus. Et aiguise ses nouvelles armes contre le crime. Le vendredi 24 mars, le camion qui déménageait, de Rosny-sous-Bois, à l’est de Paris, les équipements de l’Unité de gendarmerie d’identification des victimes de catastrophes (UGIVC) n’est jamais arrivé à sa nouvelle destination, à Pontoise, au nord-ouest de la capitale. « L’avion de la Germanwings venait de s’écraser. Il a fallu dérouter nos moyens pour aller dans les Alpes-de-Haute-Provence », se rappelle le général Jacques Hébrard, chef du pôle judiciaire de la gendarmerie. À 23 h, ce jour-là, tous les gendarmes de cette unité étaient équipés pour le grand froid, prêts à rejoindre les pentes escarpées du lieu du crash. Balistique, génétique… C’est à Pontoise que sont parvenus, plus tard, les prélèvements humains pour établir les profils génétiques qui permettront d’identifier les victimes. C’est aussi dans un autre labo, sur le même site, que la bande sonore du cockpit a été passée au crible. C’est en effet dans cette ville que la gendarmerie a bâti son tout nouveau pôle judiciaire. Bye bye les locaux vétustes et exigus du fort de Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). À deux pas du pôle universitaire de Cergy (Val d’Oise) sont désormais regroupés, dans des locaux ultramodernes, l’Institut de recherche criminelle (IRC), le Service central de renseignement criminel (SCRC) et le Centre de lutte contre les criminalités numériques (C3N). Derrière ces appellations se cachent les spécialistes les plus pointus en cybercriminalité (C3N), médecine légale, physique-chimie, balistique, analyse génétique, informatique-électronique, son et image (IRC) de la gendarmerie (*). La révolution : l’analyse prédictive Ici, les experts de l’IRC sont par exemple capables de révéler un tatouage sur un corps en état de décomposition (s’il y a toujours de la peau), de vieillir par informatique le visage d’un enfant disparu, de reproduire une clé électronique de véhicule pour y pénétrer en toute discrétion (pose de balise et micros par exemple). Ou, encore, de numériser une scène de crime en 3D, où les enquêteurs pourront se rendre à l’infini afin de vérifier des hypothèses d’enquête ou des déclarations de témoins (il suffit de regarder la scène à partir de la position que ceux-ci occupaient). Bientôt, ils seront en mesure de modéliser un visage en 3D à partir d’un simple crâne et, peut-être un jour, de faire apparaître un visage à partir d’un ADN. « Ce pôle d’envergure internationale est une réponse aux évolutions de la criminalité », se réjouit le père du projet, le général Jacques Hébrard qui avait déjà participé à la création de l’IRC à la fin des années 1980. Dans ce combat, la gendarmerie fait sa révolution. « On ne limite plus la lutte contre la délinquance à l’enquête judiciaire », rapporte le colonel Jérôme Servettaz, chef du Service central de renseignement criminel (SCRC). Réagir ne suffit plus. Les gendarmes veulent empêcher… que les faits ne se produisent. Leur arme ? L’analyse prédictive (lire ci-dessous). (*) C’est aussi de ce pôle que sont coordonnés tous les autres spécialistes en régions (415 analystes en renseignement criminel, 2.000 enquêteurs et référents cyber, 8.500 techniciens d’investigation criminelle (TIC) et TIC de proximité). En complément Prévoir où et quand les criminels vont frapper Même si elle rejette le parallèle, c’est un peu un scénario à la « Minority Report » que s’apprête à jouer la gendarmerie. Prévoir où et quand les crimes risquent de se produire : tel est le défi que veulent relever les militaires. « L’analyse prédictive n’est pas une boule de cristal, précise le général Simon-Pierre Baradel, coordonnateur national de la police judiciaire de la gendarmerie. C’est une aide à la prise de décision. Elle va servir à alerter les chefs dans chaque région et département, pour leur dire attention, tel type de délinquance apparaît ou est en hausse, cela risque de venir chez vous. » Nouveau radar « Nos méthodes sont scientifiques, insiste le lieutenant-colonel Perrot, Brestois et ingénieur, chef de la division analyse et investigation criminelle. Elles s’inspirent de celles qui se pratiquent pour les données de masse, la finance, les statistiques, l’économétrie, le marketing et la grande distribution. » Mis en branle il y a quelques mois seulement, le nouveau radar de la gendarmerie est capable de détecter des signaux faibles : cambriolages qui, pris isolément seraient passés inaperçus, trahissent la présence d’un groupe criminel organisé opérant à grande échelle ; vols de camions-plateaux, souvent annonciateurs de vols de distributeurs de billets, etc. Cambriolages et stups : un lien établi « L’analyse prédictive peut quasiment s’appliquer à tous les crimes et délits, mais aussi à des groupes criminels, des périodes et/ou des zones géographiques », précise l’officier. Couplé à plus de 200 variables de l’Insee, l’algorithme gendarmesque, basé sur les statistiques de la délinquance, permet aussi de déceler de nouvelles opportunités criminelles (impact de la création d’un nouveau quartier, d’un centre commercial, d’un parc de loisirs, etc.) et a déjà permis de corréler des phénomènes (une hausse du nombre de cambriolages est souvent suivie d’une augmentation du trafic de stupéfiants ; une hausse du nombre de bénéficiaires du RSA d’une baisse de la délinquance). « L’analyse prédictive ouvre des champs d’exploration infinis », s’enthousiasme le lieutenant-colonel Perrot. En février dernier, quand une hausse des cambriolages d’établissements industriels et commerciaux (zones industrielles, etc.) a été détectée, l’alerte a été transmise aux unités de terrain. Celles-ci ont pu augmenter les fréquences de patrouilles en deuxième partie de nuit, et aux heures d’ouverture et de fermeture de ces commerces. L’impact ? Il ne sera connu que dans plusieurs mois.

Source :  Le Télégramme 

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