« C’est une masqu-arade » : comment les anti-masque tentent de prendre pied en France
ENQUÊTE – 15.000 personnes ont défilé à Berlin ce samedi contre les mesures de lutte contre le coronavirus, notamment le port du masque. S’il n’atteint pas les mêmes proportions, ce phénomène prend aussi de l’ampleur en France.
La « guerre » des masques arrive en France
Publiée sur Facebook, la vidéo a été saluée par plusieurs internautes qui y voient une marque de bravoure. Car c’est là que ce tissu commence à provoquer la colère. « Marre de ces atteintes aux libertés« , s’offusque un internaute en commentaires d’un article sur la question, « ça va s’arrêter quand cette folie du masque ?« , se demande un autre. Chacun y va de sa propre explication pour justifier que ce produit soit devenu obligatoire. Si certains brandissent, comme aux Etats-Unis, leur « liberté », d’autres pensent que cette consigne ne « colle pas à la réalité » parce que le Covid-19 n’existerait plus. Un certain nombre encore pense qu’il y a trop de masques et qu’il faut donc s’en débarrasser. « Il y a la volonté politique à nous vendre un stock de masques avant qu’il ne devienne périssable ! ». Des théories plus folles les unes que les autres, comme celle partagée par un prêtre intégriste lebfevriste, et repéré par Tristan Mendès France, qui pense qu’en « réalité » cette consigne est un « rituel initiatique occulte » qui s’inscrit dans la mouvance « maçonnique« . Enfin, un bon nombre de personnes remettent en cause l’efficacité même de cette protection.
Parmi les Français qui dénoncent cette « masqu-arade », l’un d’eux fait particulièrement parler de lui. Prénommé Frank, il est très actif depuis plusieurs années. Mais il s’est fait connaître grâce à une vidéo récente dans laquelle il affirme prouver que le port du masque peut s’avérer fatal. Intitulée « expérience qui prouve que le masque peut vous faire crever !! » – écrit en lettres majuscules – il se met en scène en train de tenter de souffler une flamme en portant ce tissu, en vain. Pour lui, le lien est tout fait « moi je mets un masque et je me rends bien compte que je ne peux pas respirer! » Conséquence sans appel, qu’il lance face-caméra : « Vous allez crever et ce sera sans moi !! » Si l’homme n’est suivi « que » par quelques dizaines de milliers de personnes, son propos a un écho retentissant. Désormais, chacun y va de sa petite expérience. Parmi ceux qui s’y adonnent, Maxime Nicole, un Gilet jaune très influent sur les réseaux sociaux. Face caméra, dans sa cuisine, il fume sa cigarette et montre que la fumée sort du masque. Encore une fois, il y voit une preuve incontestable de la futilité du masque : « Si l’air passe dans un sens forcément quand vous allez inspirer, il se produit exactement le même phénomène. » Devant 84.000 personnes, ce Gilet jaune de la première heure lance « si les gens sont assez cons pour (…) réussir à croire qu’un simple petit bout de papier peut sauver la vie… »
Des hypothèses toutes très hétéroclites, à l’image des profils qui diffusent ce type d’idées. Ainsi, la mobilisation anti-masques de Berlin semble soutenue par tous les bords politiques. En premier lieu l’extrême droite, selon un sondage de Der Spiegel, qui sont sans surprise majoritairement (67%) « compréhensifs » face à ce mouvement, mais aussi de manière assez significative par les libéraux du FDP (35%) et à 20% par l’extrême-gauche (Die Linke). Même constat en France. « Ce mouvement en France est assez polymorphe et hétérogène« , résume Tristan Mendès France. Auprès de LCI, le chercheur spécialisé dans les cultures numériques observe qu’il y a bien « deux mouvances » qui sortent du lot, à savoir « la complosphère et la fachosphère« , mais « il n’y a pas que ça« . Un point commun relie cependant ce « panel de positionnements« . Ces individus pensent tous « pouvoir s’informer par eux-mêmes » et ce, même sur des questions techniques, complexes voire scientifiques. Si ce n’est pas un problème en soi, il le devient quand ces informations sont biaisées par le prisme des réseaux sociaux. Car, c’est en allant dans ces espaces-là qu’ils sont exposés à des contenus poussés par les algorithmes. Algorithmes qui « ne garantissent absolument pas la véracité du contenu », comme le souligne notre interlocuteur. Au contraire. Avec des publications poussées par le taux d’engagement, celles-ci « sortent souvent du cours du discours établi et consensuel« .
Source : LCI
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