Capacité opérationnelle de la gendarmerie : une directive européenne en cause
Le directeur général de la gendarmerie a sonné l’alarme concernant la dégradation de la capacité opérationnelle de la gendarmerie.
Auditionné le mardi 18 octobre 2016 par la Commission de la défense nationale et des forces armées, le directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN) a sonné l’alarme concernant la dégradation de la capacité opérationnelle de la gendarmerie due à l’application de la directive européenne 2003/88/CE qui fixe des prescriptions minimales de sécurité et de santé en matière d’aménagement du temps de travail. Elle s’applique à tous les secteurs d’activité, privés ou publics. Si, initialement, les forces armées et de sécurité bénéficiaient d’une dérogation, ce n’est plus le cas aujourd’hui, sauf événements exceptionnels.
Cette directive européenne de 2003 oblige à la mise en place de 11 heures de repos physiologique journalier par tranche de 24 heures et impose une durée maximale de 48 heures de travail hebdomadaire, alors que le temps de travail et d’astreinte du gendarme est de l’ordre de 80 heures par semaine, en moyenne. Non appliquée jusqu’à maintenant dans la gendarmerie, elle a fait l’objet de recours et plaintes.
Menacée par des actions en justice, la gendarmerie a donc dû retirer son instruction sur le temps de travail en février 2016. Un nouveau texte temporaire a été élaboré, qui est entré en vigueur au 1er septembre 2016 mais qui n’est toujours pas en conformité avec la partie du texte européen qui impose une durée maximale de 48 heures de travail hebdomadaire.La mise en place de 11 heures de repos physiologique journalier par tranche de 24 heures est « d’une difficulté sans nom », a affirmé le DGGN, qui fait état d’une baisse de la capacité opérationnelle de la gendarmerie qu’il estime entre 3 % et 5 % de temps de service en moins, soit « 3.000 à 5.000 équivalents temps plein (ETP) ».
L’application de la durée maximale de 48 heures de travail hebdomadaire implique que « quand on assure une garde à vue de 96 heures, on a quinze jours de repos ensuite », a encore déploré le DGGN, estimant la directive européenne « un peu à contre-courant au moment où nous devons tous nous mobiliser contre le terrorisme ». C’est un vrai casse-tête pour la direction générale de la gendarmerie.
Cette situation doit être regardée à travers le prisme des missions qui pourraient être confiées à la gendarmerie en 2017 : direction ou tutelle de la Garde nationale, position de « menant » dans un plan d’action de reconquête des zones de non-droit, montée en puissance nécessaire au sein de la direction centrale du renseignement territorial afin de mieux détecter les signaux faibles de radicalisation (la gendarmerie dispose d’un réseau de 3.100 brigades territoriales réparties sur 95 % du territoire national).
Les solutions envisageables ? Soit cette directive devra figurer dans le lot des traités et directives à renégocier avec l’Union européenne et la disponibilité du gendarme et du militaire en général mieux reconnue et affermie, soit les effectifs de la gendarmerie devront être, à terme, mécaniquement augmentés de plusieurs milliers, pour simplement conserver la capacité opérationnelle actuelle, déjà considérée comme insuffisante. Je ne suis pas sûr que les moyens budgétaires de l’État le permettent. En tout état de cause, l’application de cette directive européenne remet en cause le modèle de fonctionnement de la gendarmerie et sa disponibilité séculaire due à son statut militaire, ce qui n’est pas acceptable de mon point de vue.
Source : Boulevard Voltaire
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