Brest. Kerourien cerné par la Police
Mercredi, en fin de journée, une cinquantaine de CRS d’une compagnie de Marseille, a pris position sur le quartier de Kerourien, suite aux deux fusillades qui ont fait cinq blessés ces derniers jours. Deux de ces victimes sont toujours en soins intensifs. Jeudi soir, une nouvelle opération coup de poing a été menée sur le quartier.
Reportage de Didier Déniel.
Mercredi soir, les CRS étaient nombreux à Kérourien. Sous le crachin et dans l’obscurité, des véhicules stationnaient aux principaux carrefours du quartier où régnait le plus grand calme. « Ça faisait longtemps qu’on n’avait pas connu cela, commentait une résidente. Depuis un an et demi, on subit beaucoup de choses ici. Des regards appuyés et menaçants quand on rentre chez soi. Et la musique à fond en pleine nuit ».
Les agissements d’un petit groupe d’une vingtaine d’individus qui se comportent en petits caïds, sur fond de trafic de stupéfiants. « Moi je fume du shit et de l’herbe, confie ce jeune homme. J’en ai acheté au début ici. Mais j’ai très vite arrêté. Les dealers ne sont pas tendres. Ils sont insistants, veulent à tout prix qu’on leur rachète une barrette. Certains sont même venus sonner chez moi. J’ai tout arrêté avec eux. Trop tendu ».
« Un jour, ils vont renverser un gosse »
Un autre résident parle volontiers d’une petite bande de dealers qui trafique à la vue de tous. « Ils stationnent souvent devant le centre social ou dans les bosquets, derrière les appartements. Ils sont à peine âgés de 20 ans et n’ont peur de rien ».
Certains habitants se plaignent aussi des rodéos. Ces voitures et ces motos qui traversent le quartier à toute allure en faisant un boucan d’enfer. « Cet été, il m’était impossible d’ouvrir les fenêtres le samedi et le dimanche. On ne s’entendait plus. Un jour, ils vont renverser un gosse », craint cette habitante.
« Les premiers occupants des HLM vivaient dans les cabanes qui avaient été construites au Polygone, après guerre, commente un habitant âgé d’une soixantaine d’années. Ils ont aménagé ici il y a cinquante ans. Des familles d’ouvriers pour la plupart. C’était notre cas. C’était bien ici, on avait tout le confort. Ça a duré pendant des décennies, les gens vivaient en bonne intelligence. Il y a une dizaine d’années, ça a commencé à se dégrader. Et ça n’a pas arrêté ».
« Ma voiture a été détruite à coups de batte de base-ball sous mes yeux »
Fin de matinée, une retraitée sort son chien. Les coups de feu et les blessés de dimanche soir lui ont fait très peur. « Je vis ici depuis cinquante ans. J’ai vu le quartier dépérir. Regardez les espaces verts, ils ne sont pas entretenus. Avant, c’était la ville qui s’en occupait. C’était parfait. Elle a confié ça à un prestataire et ça ne le fait pas ». Effectivement, les pelouses sont hautes et les herbes folles ont colonisé les parkings. Comme un sentiment d’abandon.
Ce retraité, qui parle avec beaucoup de précautions, raconte, lui, que sa voiture a fait les frais d’une expédition punitive il y a trois ans. « Des types de Pontanézen ont débarqué un soir. Ils ont explosé plusieurs véhicules au hasard. Ma voiture, une occasion récente, a été détruite à coups de batte de base-ball sous mes yeux. J’ai payé 300 euros de franchises, j’ai porté plainte et les casseurs n’ont jamais été confondus. J’en ai marre. Je n’ai qu’une idée en tête, partir d’ici. Pas bien loin. Je sais qu’à quelques centaines de mètres, c’est beaucoup plus calme ».
Effectivement, il semblerait que le petit groupe de délinquants habite le même bloc. « C’est ici que tout se passe », lance un habitant excédé en montrant les portes d’entrée de deux immeubles. La présence policière a le mérite de rassurer les esprits. « Jusqu’à quand vont-ils rester ? Que se passera-t-il après ? Je pense qu’un jour, il va y avoir un mort », poursuite le même homme.
Jeudi, en fin d’après-midi, comme la veille, une quarantaine de policiers brestois ont procédé à une opération coup de poing dans le quartier. Procédant à des contrôles, fouillant des véhicules et des caves. Comme la veille aucune interpellation n’a été menée. Vers 18 h, les CRS de Marseille se sont à nouveau postés dans le quartier pour une surveillance nocturne.
Source : Le Télégramme
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