Agriculteur tué par des gendarmes en 2017 : « une forme de violence extrême », racontée dans « La chanson de Jérôme »

Simplifier les démarches administratives, une demande qui ne date pas d’hier et qui est au centre d’un film sorti il y a quelques jours. « La chanson de Jérôme » raconte la mort d’un paysan de Saône-et-Loire, abattu par des gendarmes après 3 ans de conflits administratifs.

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France Bleu Saint-Etienne Loire : En 2014, Jérôme Laronze, devenu Jérome Maillet dans votre film, se heurte à une administration dont il ne comprend pas les rouages et qui ne le comprend pas lui même. Personne ne se comprend finalement ?

Olivier Bosson, réalisateur de « La chanson de Jérome » : Disons qu’il était dans une forme assez contestataire de l’évolution des normes agricoles et son discours avait très peu de place parce qu’il n’y avait pas d’espaces de dialogue entre lui et l’administration. Il est devenu porte parole de la Confédération Paysanne de Saône et Loire. Quelques mois plus tard, il a eu un premier contrôle sur sa ferme. D’emblée, on a découvert qu’il avait des animaux qui étaient déclarés en retard parce que la norme avait changé depuis l’année d’avant. Au lieu que l’administration accepte de régulariser comme elle peut très bien le faire et comme elle le fait dans l’immense majorité des cas, parce qu’il était contestataire, on n’a pas laissé passer. A partir de là s’est enclenché un processus hallucinant d’une série de répressions de cet éleveur qui a duré trois ans jusqu’à sa mort.

On est en 2017, effectivement, après de longs mois de conflit avec l’administration, il est abattu par les gendarmes. Est-ce que c’est uniquement cette fin dramatique qui en faisait une histoire si importante à raconter ?

Non. Je veux presque dire au contraire. Il y a une forme de violence qui est extrême au moment où il se fait tuer. Je me suis attaché à reconstituer tout le processus qui a conduit à ça. J’étais complètement sidéré quand j’ai enquêté sur cette histoire, de découvrir qu’il y a plein d’étapes qui ont autorisé la violence d’État à se déployer. Les premières étapes existent d’emblée. Dès les premiers moments c’est sa contestation politique qui est requalifiée en problème psychologique. Le processus que j’ai essayé d’élucider dans le film passe par des embrayeurs de violence, c’est à dire des gens qui prenant telle décision, font basculer Jérôme Laronze dans une catégorie à partir de laquelle encore plus de violence peut s’exercer contre lui.

Ce film, c’est une manière pour vous, pour que Jérôme ne soit pas mort pour rien ?

Ca va même bien au delà. Il y a un problème de société énorme autour de cette histoire. Comme citoyen, je reste totalement choqué et révolté par ces faits. Je suis comme plein de gens, j’attends que la justice fasse son travail et qu’à partir de là, on discute.

Vous projetez ce film un peu partout dans notre région. Quel est l’accueil qui en est fait notamment par le monde paysan ? Ils se retrouvent là dedans, ils sont émus ?

C’est divers mais j’ai l’impression qu’on a plutôt une bonne réception parce que le film rejoue sous forme de fiction l’ensemble des faits. On a fait un gros travail de documentation donc ils reconnaissent les situations qu’ils vivent notamment les contrôles, les rapports avec l’administration, énormément de choses.

Quand vous voyez les agriculteurs qui se préparent à manifester dans les jours qui viennent, vous qui avez été à leur contact pendant des mois pour préparer et tourner ce film, forcément, ça vous parle ?

Avec l’évolution de la manière de s’occuper de l’agriculture, ce qu’on voit dans le cas de Jérôme Laronze, mais c’est applicable à d’autres domaines, c’est que les normes avancent un peu comme du nudge. On avance, on avance, on avance, mais il y a un moment où ça n’a plus vraiment de sens. C’est vraiment de l’industrialisation à marche forcée.

« La chanson de Jérome », produit par La Société des Apaches, sera notamment projeté le 26 novembre à St-Julien-Molette.

Source : France Bleu

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France 3 Bourgogne-Franche-Comté

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