Affaire Jonathann Daval : le suicide d’un homme intrigue l’avocat des parents d’Alexia
Jonathann Daval est revenu sur ses aveux et accuse désormais son beau-frère d’avoir tué sa femme, Alexia. Les enquêteurs doutent de cette version, qu’aucun élément matériel ne vient appuyer. L’avocat des parents, lui, veut que soit creusée la piste des complicités et s’intéresse au suicide d’un homme retrouvé dans la même zone que la jeune femme.
L’avocat des parents d’Alexia Daval, maître Jean-Marc Florand, croit toujours à l’existence de possibles complices de Jonathann Daval. (Capture d’écran/BFM)
Depuis les aveux de Jonathann Daval le 30 janvier dernier, l’avocat de la famille d’Alexia Daval, cette jeune femme dont le corps avait été retrouvé sans vie le 30 octobre à Gray, en Haute-Saône, évoque l’hypothèse de l’existence d’un ou plusieurs complices. Et ce n’est pas le rebondissement de l’affaire la semaine dernière – Jonathann Daval est revenu sur ses aveux et a accusé son beau-frère, Grégory Gay, d’avoir tué son épouse en l’étranglant, alors que la jeune femme faisait une crise d’hystérie – qui a changé quelque chose dans l’esprit de maître Jean-Marc Florand. Face à la chronologie incomplète de la nuit du drame et aux éléments matériels manquants, le conseil, connu pour avoir obtenu l’acquittement de Patrick Dils dans l’affaire des enfants de Montigny-lès-Metz, estime que la piste des complicités n’a pas été suffisamment creusée.
Lire aussi – Meurtre d’Alexia Daval : l’autopsie met à mal les versions successives de son mari Jonathann
Un homme retrouvé mort à proximité de là où Alexia a été découverte
Il l’a d’ailleurs dit à plusieurs reprises, avec toujours la même métaphore : « J’ai dit depuis le début de cette affaire que [Jonathann Daval] serait sûrement au générique final du film. Mais je ne sais pas à quelle place. » Dans les colonnes de L’Est Républicain samedi, maître Florand ne dit pas autre chose : « S’il [Jonathann Daval] y est pour quelque chose, il a bénéficié de complicités. »
Lire aussi – Meurtre d’Alexia : au coeur de l’affaire, la personnalité trouble de Jonathann Daval
Et une affaire obnubile particulièrement l’avocat pénaliste. Il s’agit de la mort de Yannick Chevallier, 38 ans. L’homme a été découvert mort, tué d’une balle dans la tête, le 13 janvier dans un cabanon de jardin à Esmoulins, à proximité de Gray. L’enquête a conclu au suicide, l’homme été dépressif et avait été vu la veille en train de boire. Mais un élément intrigue Jean-Marc Florand : l’arme n’a pas été retrouvée.
Je n’en démordrai pas tant que je ne disposerai pas des résultats de cette expertise
Les gendarmes, puis le parquet, ont expliqué que l’homme s’était tiré une balle dans la tête, puis avais eu le temps de jeter son pistolet dans une poubelle, avant de s’écrouler quarante mètres plus loin. La poubelle ayant été ensuite ramassée, l’arme du crime n’avait pas été retrouvée. Cette version avait notamment été renforcée par le passé dépressif de l’homme, qui avait déjà tenté de mettre fin à ses jours à trois reprises en l’espace d’un an.
Mais cette version laisse « perplexe » l’avocat des parents d’Alexia, fait savoir L’Est Républicain. Malgré les appels à la prudence du procureur de la République de Vesoul, Emmanuel Dupic qui avait exclu le 25 janvier « en l’état actuel » tout lien entre les deux affaires, l’avocat a demandé que des expertises ADN soient réalisées, pour comparer l’ADN de Yannick Chevallier aux empreintes génétiques retrouvées sur la scène de crime, dans le bois où a été découvert le corps d’Alexia. « Je n’en démordrai pas tant que je ne disposerai pas des résultats de cette expertise », assure-t-il au journal local. A ce jour, les analyses sont toujours en cours.
Interrogée sur LCI en janvier dernier, la femme de cet homme s’était dit « révoltée que le nom de son mari puisse être associé à cette affaire », demandant qu’on « arrête de salir sa mémoire » et assurant que sa famille n’a « strictement rien à voir avec les Daval ». « Je ne sais pas qui sont ces gens », avait-elle ajouté.
On ignore toujours l’heure de la mort de la jeune femme
Parmi les éléments qui posent question : le fait que le corps d’Alexia Daval ait été retrouvé en partie brûlé. A plusieurs reprises, et même du temps de ses aveux, Jonathann Daval a nié y avoir mis le feu. La chronologie, ou plutôt les trous dans la chronologie, de la nuit du drame intrigue également les parents d’Alexia. On ignore par exemple l’heure exacte à laquelle la jeune femme est morte. Tout comme on ignore l’identité de celui qui conduisait le véhicule qui a déposé le corps dans le bois, la seule certitude étant qu’il s’agit de la voiture de fonction de Jonathann Daval.
Par ailleurs, les résultats de l’autopsie établissent des faits qui ne correspondent pas aux versions données par le mari, car Alexia Daval présentait, en plus d’un étranglement, cinq traumatismes crâniens, occasionnés par des coups de poing.
Lire aussi – Alexia Daval : pourquoi sa famille ne croit pas à l’hypothèse de l’accident
Face à sa nouvelle version des faits, de nouvelles expertises vont être réalisées. L’Est Républicain précise que la téléphonie des parents d’Alexia, de sa soeur Stéphanie et du mari de celle-ci Grégory Gay, va être examinée, afin de savoir où tous se trouvaient le soir du drame, le 27 octobre 2017. Leur avocat estime que des recherches pourraient également être effectuées au domicile des parents, puisque selon Jonathann Daval, c’est là finalement que la jeune femme serait morte, et non au domicile conjugal. Les enquêteurs pourraient notamment y chercher d’éventuelles traces de sang.
On ne sait pas s’il est dingo, s’il couvre une autre personne ou si la vérité est pour lui beaucoup trop lourde à porter
Parallèlement, de nouvelles expertises psychologiques vont être effectuées sur Jonathann Daval. Selon l’avocat des parents, ses nombreux revirements – il avait d’abord joué les veufs éplorés, avant d’avouer avoir tué sa femme par étranglement en tentant de la maîtriser et alors qu’ils se disputaient, puis finalement d’accuser son beau-frère – posent la question de ses éventuels troubles psychologiques. Lors d’une conférence de presse jeudi dernier, le conseil s’était interrogé sur le fait de savoir si l’homme n’était pas « dingo ».
« On ne sait pas s’il est dingo, s’il couvre une autre personne ou si la vérité est pour lui beaucoup trop lourde à porter », avait-il ainsi dit. « Je connais mon client (…) sa santé mentale est totalement intacte et son discours parfaitement cohérent », avait répondu l’avocat de l’intéressé, maître Randall Schwerdorffer sur France Bleu Besançon. Lui justifie les revirements successifs de son client par la nécessité qu’il avait de digérer la mort de sa femme et d’accepter les faits.
Dans ce contexte, de nouvelles auditions, de Jonathann Daval mais aussi des membres du clan d’Alexia, sont à prévoir.
Laisser un commentaire