Abrogation de l’instruction 1000 : Vous avez dit Bizarre ? Comme c’est bizarre !
Restons vigilants !
L’instruction 1000/GEND/DOE/SDSPSR/SP du 9 mai 2011 relative au temps d’activité et aux positions de service des militaires d’active de la gendarmerie a été abrogée le 23 février 2016. Dont acte!
Tout le monde a lu les compte-rendus des courriers adressés par Gend XXI aux ministres de l’intérieur et de la défense pour exiger l’application de la directive 2003/…
De même, Gend XXI a formé une plainte devant la Commission de l’Union Européenne pour dénoncer une violation potentielle de la directive sur le temps de travail. Pour les néophytes, il ne s’agit pas d’une plainte au sens pénal, mais d’un simple signalement auquel la Commission doit répondre dans un délai d’un an…Il n’y avait pas là de quoi faire trembler la France.
S’agissant du ministre de la défense, en l’absence de texte sur le temps de travail ou de preuves de violations flagrantes des dispositions de la directive, il était difficile de lui reprocher quelque chose.
Ce n’était pas le cas du ministre de l’intérieur qui avait laissé le soin au DGGN de réglementer le temps d’activité des gendarmes en s’affranchissant quelque peu des limites fixées par la directive.
Toutefois, il faut savoir qu’en 2014 une révision de la directive a été lancée par la Commission. Seule à ma connaissance, l’Adefdromil (aujourd’hui Aide aux Victimes) avait informé de la procédure.
C’est sans doute dans le cadre de cette révision que le ministre de l’intérieur et la DGGN étaient en discussion avec la Commission, manifestement pour obtenir des dérogations à son applicabilité aux militaires.
Car dans sa version initiale toujours en vigueur, rien n’exclut l’applicabilité de la directive aux militaires des pays de l’UE. Seule exception de taille et parfaitement logique : l’application stricte de la directive serait exclue lors des opérations et de l’accomplissement des missions ».
Le 16 février 2016, tout allait très bien. Madame Anne-Sophie AVE, Directeur des ressources humaines du ministère de la défense adressait ce même jour un courrier au gendarme Frédéric LE LOUETTE, nouveau Président de Gend XXI, en réponse à une lettre adressée par cette association le 20 décembre 2015. Elle y précisait : « Conscients de la nécessaire transposition de la directive précitée, le ministère de la défense et le ministère de l’intérieur sont fortement mobilisés sur le sujet depuis de nombreuses années. Les travaux de transposition statutaire sont en cours, travaux auxquelles la Commission européenne est actuellement associée. Je ne manquerai pas de vous tenir informé de l’évolution de ce dossier » .
Ce courrier ne faisait nullement allusion à une possible abrogation de l’instruction 1000.
Alors, comment expliquer que 7 jours plus tard et sans crier gare, le DGGN abroge l’instruction pour « lever toute ambiguïté » ?
C’est qu’entre temps l’Adefdromil – Aide aux Victimes avait publié un article sur son site le 20 février expliquant que sa démarche était un peu plus avancée que celle de Gend XXI, puisqu’elle était déjà devant le Conseil d’État.
Nul ne sait ce qu’il s’est réellement passé en coulisses : la DGGN connaissait-elle le recours engagé par l’Adefdromil-Aide aux Victimes qui conduisait probablement à une annulation fâcheuse dans le cadre de négociations avec Bruxelles ? On peut en douter.
Ou bien est-ce le Conseil d’État qui, par obligeance envers la Gendarmerie, a tiré la sonnette d’alarme pour annoncer une annulation probable ? Le message aurait alors simplement pu passer par la directrice des affaires juridiques, Madame Claire Landais, membre détaché du Conseil d’État.
En tout cas, la DRHMD, elle, ignorait manifestement ce qu’il se passait ce qui explique le courrier du 16 février, devenu soudainement caduc le 23 février 2016.
Les téléphones ont dû vibrer entre la DGGN, la DAJ, la DRHMD, et d’autres…
Comme a pu le dire John Kennedy : « La victoire a cent pères, mais la défaite est orpheline ».
A chacun donc de se faire une idée de ce qui a pu décider le DGGN à abroger l’instruction et à reconnaître implicitement que la Gendarmerie n’était pas tout à fait dans les clous par rapport à la directive européenne de 2003.
Il reste, et c’est ce qui est le plus important, de savoir ce qu’il va sortir des discussions entre les représentants de la France et la Commission en matière de temps de travail pour les personnels servant sous statut militaire ?
La plus grande vigilance s’impose. Les gendarmes, en particulier, comprendraient mal que, sous prétexte de lutte contre le terrorisme et d’état d’urgence, on parvienne à pratiquer une régression sociale en matière de temps de travail, alors même que le droit d’association à titre professionnel vient à peine de leur être reconnu.
MORRA Paul
Président de l’APNM ADEFDROMIL-GEND
Source : ARMEE-MEDIA
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