Castaner, à l’école des contorsions
Castaner, à l’école des contorsions – Dessin Fabien Clairefond pour « Les Echos »
L’ancien socialiste défend une loi anticasseurs puisée à droite au moment où la gauche macroniste se réveille. Petit concentré des contradictions du pouvoir.
La meilleure façon d’aborder le ministère de l’Intérieur, quand vous n’y avez pas fait vos classes, est de se poser en père des troupes. Christophe Castaner ne lâche pas cette ligne depuis quatre mois. Sur le terrain, sur les photos, dans les polémiques, il est le défenseur inlassable des forces de l’ordre. Y compris lorsque les manifestations des « gilets jaunes » virent à la « marche blanche des victimes de violences policières ». Les LBD (lanceurs de balles de défense) sont mis en cause, les enquêtes internes se multiplient, mais, faute de mieux, il les justifie. Protéger les siens, encore et toujours.
Avec la loi anticasseurs , Christophe Castaner est dans ce registre et fait même plus. Il est désormais la carte politique d’un Macron en opération reconquête. Il faut restaurer l’ordre, ou du moins montrer qu’on s’en occupe, et rassurer cette partie de l’opinion effarée par les violences de décembre. Il assume, il défend cette loi puisée aux sources LR, et cherche des arguments, fussent-ils boiteux, pour en faire une « loi de libertés » : « Elle ne vise pas à empêcher, au contraire, elle vise à protéger les manifestants ».
Stratégie électorale
Depuis le début de l’année, Emmanuel Macron reprend la main à droite – ordre public, réformes et cap -, avec les élections européennes en ligne de mire. Cette stratégie électorale sera peut-être payante le 26 mai – elle lui permet déjà de remonter dans les sondages -, mais elle est loin d’être naturelle pour Christophe Castaner. Jusqu’ici parrain de la Macronie de gauche (issu du PS), il devient le visage de l’ordre et d’une stratégie marquée à droite.
Et comme la politique ne manque jamais de malice, il fait cette mue au moment où ses « filleuls », macronistes de gauche, se mettent à peser et à exister à l’Assemblée nationale. Culturellement, il devait être l’un des leurs dans les débats tendus du groupe sur la loi anticasseurs ; fonctionnellement, et plus encore politiquement, il était dans l’autre camp. Obligé d’opposer des arguments aux plaidoyers pro-liberté des avocats Sureau et Mignard. Ou à défaut d’afficher sans faillir sa détermination. « C’est une loi de bon sens », a-t-il défendu à l’Assemblée, avec le bon sens… politique de qui est d’abord le soldat de Macron.
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