À la vie à la mort !
Par Henri ROURE
Je n’avais pas pour Badinter cette admiration que les journalistes de la presse grand public supposent unanime. Je suis cependant reconnaissant à sa mémoire, évoquée dans toute la presse, de me permettre de dire ma pensée sur l’abolition de la peine de mort et de faire quelques digressions sur des sujets voisins.
Une fois encore le pseudo-humanisme ambiant se complaît dans les plus étranges contradictions. Je le qualifie « d’humanoïsme », tant la recherche d’un sens à la vie s’est égarée dans une déformation du respect de l’être humain et dans des outrances stupéfiantes. Le personnage qui vient de disparaître en a été un des propagateurs en portant son attention sélective sur l’individu plutôt que sur le peuple et quand il s’est intéressé à la mémoire des peuples il a été très discriminant sur l’origine des personnes. Il a argumenté, par exemple, sur les massacres du XXe siècle, en faisant une distinction malsaine entre le génocide des Juifs par les Allemands et celui des Arméniens par les Turcs. Il n’y a plus, en vérité, aucune cohérence dans la considération que tout État doit porter à ses enfants dans le collectif national. Il est vrai que depuis des décennies la nation est malmenée par la tentative de brassage européiste privilégiant, en toute logique supranationale, l’individu, à la famille et cela va sans dire, aux patries.
Le personnage qui vient de s’éteindre portait — paraît-il — une quasi-vénération à l’article 1 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. « Tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit… ». Reprise par les préambules des constitutions de 1946 et de 1958, il présente, c’est vrai, une puissante intensité. Encore faut-il que cette affirmation, à laquelle personnellement j’adhère pleinement, soit respectée dans tout ce qu’elle signifie. Elle sous-entend que la société organisée, en substance l’État, protège cette égalité des individus dans le collectif de la Nation. L’homme, si je comprends bien l’esprit de ce que les rédacteurs ont écrit, est l’alpha et l’oméga de toute politique. Sa dignité est un absolu. Certes, mais il est aussi indispensable que l’homme se montre conforme à cet absolu et ne trahisse pas le devoir de respect du pacte social qui en est l’obligatoire conséquence. Vous conviendrez avec moi que des personnes attentant à la vie d’autres personnes, est la pire des offenses faites à cette règle primordiale. Alors que dire des terroristes, des violeurs, des assassins de braves gens ? La Déclaration universelle poursuit dans son article 4 « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. » Une question se pose ainsi : est-ce que Mohammed Mehra, les islamistes du Bataclan, de Charlie Hebdo, les tueurs du colonel Beltram, du père Hamel, des professeurs Paty et Bertrand, de bien d’autres… ou encore du jeune Thomas à Crepol, ayant transgressé ce Droit fondamental et les principes humains, ne méritent-ils pas, ou n’auraient-ils pas mérité, une sanction à la hauteur de leurs crimes ? Une punition légale égale à celle qu’ils ont appliquée à des innocents au nom d’une idéologie religieuse totalitaire ? Ajoutons à cette liste d’horribles personnages ceux qui font couler le sang, sans remords, ou abusent de la faiblesse d’enfants, de vieillards ou de femmes. Ils nient cette égalité de tous, pour la satisfaction de leurs pulsions, sans remords et par mépris de la vie humaine.
La Nation doit primer l’individu et l’État se doit de protéger la Nation. C’est d’ailleurs ce qu’exprime cet article 4.
En conséquence faut-il simplement condamner ces monstres à la prison à temps ? Nous savons par expérience qu’il n’y a pas, dans les faits, de peines incompressibles. Il arrive toujours un moment où de bonnes âmes pétries d’humanoïsme, demanderont la libération des assassins pour « bonne conduite ». Ils jouiront à nouveau de toutes les libertés publiques comme vous et moi. Pendant la durée de leur peine que je considèrerais toujours mineure en face de l’innommable flétrissure faite à l’humain, ils seront nourris et abrités aux frais de la nation, qui ainsi subira une sanction financière, s’ajoutant à la meurtrissure reçue. Il s’agit d’une inversion des valeurs. Les droits à réparation de la victime sont dévoyés au profit du coupable. Certaines de ces bonnes âmes me diront que ces assassins sont eux aussi des humains et qu’à ce titre la nation, ne peut appliquer ce qu’elle interdit aux individus. Le Décalogue dont nos constitutions se sont inspirées, dit bien « tu ne tueras point ». D’ailleurs, confirmant l’adhésion à cette Loi reçue par Moïse, la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen se place « en présence et sous les auspices de l’Être suprême ».
Je pourrais donc dire que la faute commise étant tellement hors de toute compréhension, la justice humaine ne peut faire autrement que renvoyer le coupable devant le tribunal de Dieu… Mais en disant les choses plus prosaïquement, les obligations de l’État ne sont pas celles du citoyen. L’État est l’arbitre, l’organisateur, le protecteur. Il est l’organisation qui par des moyens ou des actes que lui seul peut mettre en œuvre, au nom de tous, maintient l’égalité entre les citoyens et assure la sécurité de la Nation. Il peut déclencher une guerre et réagir par la force à une attaque étrangère de nature militaire, ce qui l’amène à tuer, parfois massivement. Il n’y a donc aucune raison véritable qu’il n’applique pas aux individus qui agressent des citoyens avec des armes, les sanctions qu’il engage contre d’autres États ou collectivités humaines qui font de même à une échelle supérieure. Il s’agit d’homothétie, simple rapport de transformation par diminution…
Mais les contradictions que monsieur Badinter a promues s’ajoutent à bien d’autres. Ainsi il est question d’inscrire dans la constitution le droit à l’avortement qui est un meurtre légal. Il s’agit de donner une dimension supérieure à la Loi existant sur le sujet. Madame Simone Veil a été panthéonisée pour avoir promu cette loi sur le contrôle des naissances et « l’interruption volontaire de grossesse ». L’avortement peut être réalisé désormais jusqu’à la fin de la 14e semaine de grossesse, soit 16 semaines après le 1er jour des dernières règles. Ce qui signifie qu’un fœtus humain formé, de trois mois et demi, peut être éliminé.
Si je fais la relation entre la loi Badinter et la loi Veil, j’en conclus que l’on garde en vie les pires sanguinaires et que l’on tue des innocents ! Dans les deux cas, la Constitution affirme de manière solennelle cette étrange contradiction.
Ajoutons encore quelques points qui finissent par m’interpeller sur le respect des fondements de notre civilisation. Il est envisagé de légiférer sur la fin de vie et de permettre le suicide assisté, avec tous les risques de dérives que la loi ne pourra pas prévoir. Là aussi l’État va contribuer à la mise à mort de personnes innocentes au lieu d’apporter une aide construite à la recherche médicale et de légiférer sur l’amélioration des soins.
Enfin ce même État a reconnu le mariage pour tous et donc accepté la formation de couples stériles. M. Badinter n’est pas étranger à cette blessure faite au Droit de la famille et à sa structure normale et millénaire…
Pour couronner ces incohérences, le gouvernement actuel vient de constater avec désarroi que les générations ne se renouvelaient pas et que la France risquait de lentement s’éteindre.
Revenir en arrière n’est pas être nostalgique de temps passés. Il s’agit après avoir admis ses erreurs, de les corriger, pour se tourner vers l’avenir avec un esprit lavé de tous les dérèglements. C’est ainsi que procèdent les peuples civilisés. Il faut oublier au plus vite monsieur Badinter.
Henri ROURE
Source : Nouveau Monde
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